Question d'origine :
Bonjour,
il me semble qu'il existe des pays (cultures) ou le retrait de l'appendice se fait d'office sans attendre son inflammation.
Pourriez-vous m'en dire plus SVP ?
Merci
Réponse du Guichet
bml_san
- Département : Médiathèque du Bachut Santé
Le 18/03/2005 à 13h09
Enlever l'appendice pour des douleurs abdominales chroniques est inefficace et comporte un risque de complication (occlusion sur bride essentiellement).
Autrefois, avant de partir pour des courses en solitaire les marins se faisaient enlever l'appendice pour ne pas faire une appendicite en pleine mer. C'était un mauvais calcul car ils faisaient des occlusions suite à l'ablation de l'appendice. Ces occlusions, en l'absence de traitement urgent, étaient mortelles, alors que s'ils avaient fait une appendicite, ils auraient eu plus de temps devant eux et n'en seraient même pas forcément morts avec l'aide des antibiotiques. C'est un peu le même principe qui fait qu'actuellement, on n'enlève plus l'appendice préventivement.
Il existe une exception cependant. Devant un enfant qui a des crises douloureuses abdominales à répétition, on peut être amené à enlever l'appendice pour deux raisons.
En 1987, plus de 300 000 interventions pour appendicites réelles ou supposées (appendicectomies) ont été pratiquées en France. Ce chiffre considérable correspondait à l’époque à 40 % des actes de chirurgie sur l’abdomen effectués dans l’Hexagone, soit un taux quatre fois supérieur à celui observé dans d’autres pays d’Europe et d’Amérique du Nord.
Rendue public début mai, une étude de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) coordonnée par L. Tiret et réalisée avec le concours de plusieurs dizaines d’anesthésistes français révèle que la situation s’est un peu améliorée en dix ans puisque "seulement " 132 936 actes chirurgicaux pour appendicite ont été réalisés en 1997, soit un nombre d’opérations diminué de moitié.
Au moins 50% d’opérations inutiles
Pour le Pr. Y. Flamant (Hôpital Louis Mourier, Colombes), ceci correspond toutefois à un excès d‘actes d’au moins 50 %. Pourtant, d’autres interventions courantes sont effectuées avec la même fréquence en France que dans les pays de niveau socio-économique comparable. Les données fournies par les services hospitaliers permettent, par ailleurs, de disposer de quelques informations sur ces opérations.
Elles interviennent dans environ 56 % des cas dans des structures d’hospitalisation privées et pour le reste dans les hôpitaux publics, elles ne sont pratiquées que dans 27 % des cas par vidéo-laparoscopie sans ouvrir l’abdomen. Un taux assez réduit mais qui s’explique probablement par le faible rapport coût-efficacité de cette nouvelle chirurgie dans l’appendicite.
La mortalité globale est de 0,13 % en secteur public et de 0,04 % en secteur privé, cette différence pouvant résulter en partie du fait que les hôpitaux publics prennent en charge davantage de cas compliqués, notamment certaines appendicites sévères des sujets âgés.
La durée moyenne d’hospitalisation est un peu plus longue dans le secteur public, 5,7 jours contre 4,8 jours.
A noter enfin que dans le secteur public, ni le nombre d’appendicectomies, ni la mortalité consécutive à ces opérations, ni la durée moyenne de séjour n’ont diminué au cours de ces trois dernières années.
Bon nombre de ces actes chirurgicaux ont certainement été réalisés alors que l’appendice était normal, car il semble déraisonnable de penser que la fréquence de l’appendicite est supérieure en France à celle que l’on observe dans les pays voisins. Mais, "malheureusement, les données hospitalières ne sont pas assez fines, d’une part, et par ailleurs trop subjectives pour apprécier le nombre de ces interventions inutiles", indique le professeur Yves Flamant.
Une étude histologique de 1 824 appendices enlevés après chirurgie avait toutefois conduit Yves Flamant et les Associations de recherche en chirurgie à conclure en 1992 que 24 % des appendices opérés étaient normaux ou simplement fibreux.
Une exception française ?
Plusieurs éléments pourraient expliquer cette propension bien française à opérer devant la moindre douleur abdominale faisant craindre le diagnostic d’appendicite. On peut citer une exagération de la gravité de cette maladie, souvent fondée sur des notions dépassées aujourd’hui et le fait que l’appendicectomie est "un geste rapide, simple, rarement compliqué". Conséquence de cet "élan irrésistible vers l’appendicectomie", seulement 4,5 % des appendicites sont opérées à un stade d’abcès contre 40 % dans les pays anglo-saxons. La mortalité n’est pourtant pas supérieure dans ces pays, où l’on opère avec davantage de parcimonie. "Les enfants et les femmes en période d’activité génitale", chez lesquels l’appendicite est souvent difficile à différencier d’autres affections digestives ou gynécologiques "sont particulièrement sujettes à l’appendicectomie discutable", souligne Yves Flamant.
Selon ce spécialiste, on peut malheureusement craindre que "du temps soit nécessaire pour faire évoluer la mentalité française". Pourtant, quelques mesures de bon sens permettraient d’éviter des interventions non justifiées et les risques anesthésiques associés. Pourquoi, par exemple, ne pas attendre 24 heures, en l’absence bien sûr de contexte d’urgence ou de tableau clinique fortement évocateur, pour opérer ? Un délai suffisant et qui ne fait pas de courir de danger au malade. La présence de quelques signes comme une fièvre inférieure à 38 ° C, un abdomen souple et un nombre de globules blancs inférieur à 10 000/mm3 constituent également autant d’éléments rassurants, conduisant à faire préférer la surveillance clinique à une décision opératoire immédiate. De façon plus générale, il faudrait aussi pour ce chirurgien, "élargir les critères cliniques et admettre que le geste chirurgical doit être réellement curatif et non viser à prévenir un danger hypothétique".
Dommage aussi que les anatomopathologistes préfèrent parfois s’abriter derrière des termes savants comme ceux "d’appendicite folliculaire, lymphoïde, catarrhale, subaiguë, chronique" plutôt que d’admettre que l’appendice était tout simplement "normal". Ou que "l’on signale des foyers congestifs ou hémorragiques, plus souvent secondaires à la pince de l’opérateur qu’à des phénomènes inflammatoires". En effet, cette attitude peut faire méconnaître pendant plusieurs mois des calculs urinaires ou des infections gynécologiques ou digestives à l‘origine des douleurs abdominales présentées par les malades.
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