Question d'origine :
bonjour,
les régions françaises comme le luberon, le berry, la beauce, la brie, la chalosse, le bearn, le gevaudan etc. ne sont pas des départements francais.
Etaient ce auparavant des circonscriptions administratives par exemple sous l'ancien régime?pourquoi ne sont elles pas devenus des départements?
pourtant l'aquitaine, la Normandie, la bourgogne, etc. étaient des duché, je crois, pourtant elles sont toujours existante à l'heure actuelle?
pouvez vous m'en dire plus...
cdlt
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 13/08/2013 à 13h50
La question du découpage territorial de la France, des régions, pays, provinces, appellations recouvrant souvent des réalités très différentes, ne date en effet pas d’aujourd’hui.
« Des circonscriptions qui divisent la Gaule du V° siècle au résultat du référendum sur le traité de Maastricht en 1992, quarante six cartes donnent à voir quelques unes des divisions, des découpages religieux, administratifs, fiscaux et judiciaires qui ont organisé et encadré la vie des hommes [….]
Nul étonnement face au nombre de cartes d’abord consacré aux structures religieuses : elles témoignent de l’ancienneté, de la précocité, de la solidité aussi du réseau des métropoles et des évêchés qui s’est calqué sur la distribution des provinces civiles et des cités dessinées lors de la réforme administrative de Dioclétien, à la fin du III° siècle. Car ce sont bien les hommes d’église, une poignée de savants de gestionnaires et d’administrateurs, qui ont d’abord structuré le territoire, et ses habitants, bien avant le début du royaume « de France », et ce sont eux qui ont laissé les sources écrites les plus anciennes, notamment les cartulaires qui nous permettent de visualiser et de cartographier leur emprise sur une espace. »
Atlas de l’histoire de France.
Voir les différentes cartes : p 219-265
« L’ancienne France est une société de communautés territoriales […] Au point de vue territorial, la France est d’abord composée de provinces. Certaines ont été rattachées tardivement, soit au domaine royal, quand elles étaient déjà partie intégrante du royaume, soit à la personne du roi, alors qu’elles tendaient déjà à former des nations distinctes. Leur rattachement s’est effectué par un contrat passé avec le roi. […]
Dans chaque province, nous trouvons des seigneuries, des villes, des communautés. »
La France et les Français. p 1037 et suivantes
«
Sens du mot province
Nous entendons ici par « provinces » les étendes territoriales caractérisées par une civilisation commune, un ensemble de coutumes, de traditions, de privilèges exprimant une personnalité morale et des intérêts communs, dotées d’organes politiques leur permettant de former et de manifester une volonté commune.
L’ancienne France a connu bien d’autres sens du mot. Province, c’est une circonscription ecclésiastique quelconque ; ce peut être une circonscription administrative, judiciaire, militaire, crée par la monarchie, un baillage, une sénéchaussée, une élection, une recette générale, un gouvernement. Ce peut être tout la France , comme chez le poète Passerat, au XVI° siècle : « La France est la perle des provinces ».
Pour nous ce sera ici les régions qui ont constitué » des communautés naturelles fondées sur une tradition des ancêtres, les « nôtres », la « patri ». Les uns portent le nom d’un peuple gaulois, comme l’Auvergne où revivent les Arvernes, l’Anjou, les Andegavi, l’Artois et les Atrébates ? Les autres, des noms rappelant la conquête et la colonisation romaines, la Provence, provincia, l’Orléanais, Aurelianensis, le Bourbonnais, Burbo. D’autres enfin rappellent l’établissement d’envahisseurs, l’Ile –de-France, les Francs ; la Bourgogne, les Burgondes ; la Gascogne, les Vascons. Presque tous ces noms de province sont antérieurs au VI° siècle de notre ère, tous sont formés au XII ° siècle. Au XVIII° siècle, avant le rattachement de la Lorraine et de la Corse, Doisy donnait une liste de 58 provinces : « Agenis, Alsace, Angoumois, Anjou, Artois, Aunis, Auvergne, Bazadois, Béarn, Beaujolais, Bigorre, Blaisois, Bourbonnais, Bourgogne, Bresse, Bretagne, Brie, Bugey, Cambrésis, Champagne , Condomois, Dauphiné, Flandres, Forez, Franche-Comté, Gascogne, Gâtinais, Gévaudan, Guyenne, Hainaut, Isle-de-France, Landes, Languedoc, Limousin, Lyonnais, Maine, Marche, Navarre, Nivernais, Normandie, Orléanais, Pays Messin, Perche, Périgord, Picardie Poitou, Provence, Quercy, Rouergue, Roussillon, Saintonge, Saumurois, Toulois, Touraine, Velay, Verdunois, Vivarais ».
Les provinces ne se confondaient donc pas avec les gouvernements. Sous Henri III, il y avait 12 gouvernements. L’ordonnance du 18 mars 1776 énumérait 18 gouvernements généraux de première classe et 21 gouvernements généraux de deuxième classe, 39 en tout.
Les provinces ne se confondaient pas non plus avec les généralités, circonscriptions financières et administratives, au nombre de 27 sous Louis XVI […]
Les provinces se subdivisaient en « pays » ou unités naturelles plus petites , comme le Hurepois dans l’Ile-de-France , la Beauce dans l’Orléanais. Il devait y avoir en France environ 300 « pays »
Pour en savoir plus les Institutions de la France sous la Monarchie Absolue, voir les pages 470 et suivantes
ou
Euraldic.com.
Situation complexe donc, avant la Révolution française.
« Le découpage de 1789 de la France en départements (les départements en districts, les districts en cantons, les cantons en communes) est fait de façon rationaliste en vue de supprimer les obstacles à l’unité de la nation.
L’unité géographique de base est définie par les nécessités d’ordre public. D’un chef-lieu , la puissance publique doit pouvoir atteindre, entre le lever et le coucher du soleil, tous les points de la circonscription. […]
Le nom même de la plupart des provinces a disparu du langage officiel à la fin de l’Ancien régime. Les généralités sont désignées par le nom de la ville chef-lieu et on les classe habituellement comme on classera plus tard les départements par ordre alphabétique. L’innovation consiste à porter le nombre de divisions d’une trentaine de généralités à quatre-vingt-trois départements, à les appeler départements au lieu de généralités et à les désigner, par le nom d’une montagne ou d’une rivière au lieu d’une ville .La délimitation des départements vaut mieux que celle des généralités en ce sens que leur plus rand nombre a permis de se prêter à plus de diversité. Il est du reste à remarquer que pas plus avec les départements qu’avec les généralités, l’existence de nos vieilles provinces n’a été détruite. Dans l’un et l’autre cas, le nom banni du langage administratif, est resté dans le langage courant. Il ya toujours des Bretons, des Normands, de Lorrains, des Provençaux, et on n’en n’ est pas mois bon français pour avoir conservé de l’attachement à sa province natale. »»
Département ou Région ? Les réformes territoriales de Fénelon à Attali.
"Plus que tout autre élément le nom des collectivités territoriales sert à identifier, c'est-à-dire reconnaître mais aussi à distinguer, les différentes collectivités.
[…]
« La détermination du nom des départements a été l’œuvre de l’Assemblée constituante en 1790. Apres avoir écarté le nom des anciennes provinces (par exemple le département du Dauphiné du Nord) ou celui de la ville principale (par exemple le département d’Auxerre) ou une simple numérotation des départements, l’Assemblée adopta une terminologie géographique et descriptive Les fleuves, rivières, proximité de la mer ou les montagnes expliquent le nom des départements français, seul celui des Landes ayant conservé une dénomination issue de l’Ancien Régime. »
« Les noms des régions ont été établis en 1955-1956 par l’arrêté du 28 novembre 1956 qui établit la liste des programmes d’action régionale. Le choix s’est porté sur l’histoire (Bourgogne, Bretagne, Alsace, Provence) la géographie (Midi-Pyrénées, Pays-de-Loire, Rhône-Alpes ou la région Centre).
Lors de la transformation des ces Programmes d’action régionale en circonscription d’action administrative par le décret n° 60-516 du 2 juin 1960 portant harmonisation des circonscriptions administratives, puis en établissements publics par la loi du 5 juillet 1972, puis en collectivités territoriales par les lois du 2 mars 1982 et du 6 janvier 1986, les anciennes dénominations ont été maintenus, afin sans doute d’éviter le bouleversement des habitudes prises. Seule la région Provence-Côte d’Azur est devenue Provence-Alpes-Côte d’Azur » par le décret n°76-722 du 2 août 1976 portant modification du nom de région.
En dehors de ce cas, aucune région, malgré des tentatives comme celles menées par la région Centre pour adopter une dénomination moins descriptive, et parfois confondue avec le Massif Central ? n’a pu faire aboutir une procédure de changement de nom. Leur territoire n’a pas non plus été modifié depuis leur création. »
Droit des collectivités territoriales.
Comme vous le voyez nom des circonscriptions administratives ou territoriales ne coïncident pas nécessairement avec les noms que portaient autrefois les provinces.
Les tentatives d’ancrer les régions dans ce passé ont toujours été très conflictuelles.
On peut rappeler, par exemple, les tentatives de Georges Frêche dans le Languedoc- Roussillon :
« Septimanie et Languedoc-Roussillon
Après son élection à la tête de la région Languedoc-Roussillon en 2004, Georges Frêche a lancé l'idée de changer le nom de la région en « Septimanie », terme qu'il estimait plus judicieux que son ancienne désignation, issue des travaux de la DATAR. Le Conseil régional a commencé à utiliser ce nom très largement. Il a toutefois rencontré une franche opposition d'une large population, surtout chez les Catalans dans les Pyrénées-Orientales qui estimaient, que le nom « Septimanie » pourrait nuire à l'identité catalane et nier la double identité culturelle présente dans la dénomination même de Languedoc-Roussillon. De plus, l'ancienne Septimanie ne recouvrait pas exactement les limites du Languedoc-Roussillon actuel, spécialement le Gévaudan qui est aujourd'hui le département de la Lozère.
Cette opposition, cristallisée par plus de 45 000 signatures recueillies par les catalans et une manifestation rassemblant 8 000 personnes à Perpignan, le 8 octobre 2005, ont conduit Georges Frêche à renoncer à ce changement de nom. »Wikipedia.
Pour retrouver l’historique des noms de province :
Dictionnaire des noms de lieux de la France.
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