Question d'origine :
Bonjour,
J'aimerais savoir pourquoi Dali a-t-il tellement marqué son temps ainsi que le nôtre ? Qu'est-ce qui fait qu'on en parle toujours aujourd'hui ? Qu'a-t-il de différent par rapport aux autres artistes de son temps, qu'a-t-il de plus que les autres pour que sortent des hors série à son effigie ? Pourquoi parle-t-on toujours de lui de nos jours ?
Par avance merci de votre réponse.
Réponse du Guichet
bml_art
- Département : Arts et Loisirs
Le 30/10/2012 à 14h18
Il faut tout d’abord rechercher les raisons de la notoriété de Salvador Dali (1904-1989), passée et actuelle, dans la qualité de son œuvre. Pour mieux l’aborder, je vous propose quelques extraits du livre :
Dali : l'oeuvre et l'homme :
p. 7 : «Le rapport qu’il établit entre son œuvre et son spectateur est un rapport de force : il communique, malgré lui, les fantasmes qui l’aveuglent le paysage qui l’a marqué comme un propriétaire marque ses bêtes au fer rouge, la violence tout espagnole qui coule dans son sang, et dont il est, peut-être, la première victime. »
P. 8 : Il est surréaliste « non par une recherche de l’insolite ou de l’étrange pour l’étrange, mais par cette vitesse technique capable de suivre la matérialisation soudaine de l’image suggérée. Deux univers se superposent chez Dali : celui de la réalité pure, et celui de l’association, de la cohérence objective du monde onirique…. A partir d’une volonté de réalisme, mais s’accompagnant de simulation, de déguisement, Dali va peindre deux tableaux superposables, jouer avec les images premières, suggérer celles qui sont ou ne sont pas visibles au premier coup d’œil. Cette profusion optique, ces permanentes anamorphoses, ces rapprochements en apparence gratuits et irrationnels sont toujours délibérés. Dali n’est pas le peintre du hasard, de la rencontre inopinée, mais du délibéré, du pensé, du logique inexorable. S’il y a un sentiment permanent dans on œuvre, c’est la fatalité. Il a toujours dénoncé « l’intuition logique » mais se soumet à « l’irrationalité » : il cherche à « matérialiser avec la plus impérialiste rage de la précision les images de l’irrationalité concrète."
p. 9 : "Dans son pathologique besoin de protection, il s’est fabriqué un exosquelette mental dont il tire son esthétique : le rapport dur/mou ; le mou, c’est « la viande » : le biologique, le dur, c’est la tête-pensante, la tête-cerveau. En fonction de cette spécification, les thèmes daliniens essentiels seront finalement peu nombreux malgré l’étonnante virtuosité de l’artisan, mais tous chargés de significations bien précises."
Je ne vous cite ici que quelques extraits du texte éclairant de Robert Descharnes, qu’il faut lire en intégralité.
- De plus, il a produit une œuvre protéiforme : tableaux, dessins, gravures, sculptures, bijoux, flacons de parfums : ces derniers objets furent aussi l’occasion de parler de lui… Il fut aussi écrivain, réalisateur, créateurs de décors et de costumes : il investit la scène artistique de toutes parts : il s’intéressa à la mode en collaborant avec Coco Chanel et Chritian Dior, au théâtre avec Peter Brook, réalisa des décors de ballet pour Maurice Béjart, il créa des couvertures de magazines américains pour the American Weekly, Vogue, Town & Country, des pochettes de disques, et travailla pour les collants Bryans Hosiery, la bouteille Perrier, pour Alka Seltzer, pour Datsun. (Source : daliparis.com.)
Il créa aussi, en 1936, le canapé Boca, édité par Gufram, qui connu ensuite plusieurs versions et fit l'objet de déclinaisons (par exemple, la version de Bertrand Lavier réalisée par la Manufacture nationale de Sèvres en porcelaine vernie.)
- Dali et le surréalisme :
La rencontre déterminante avec le surréalisme libère son extraordinaire puissance créative.
« Dali continuait d'exposer régulièrement et rejoignit officiellement le groupe des surréalistes dans le quartier parisien de Montparnasse. Durant les deux années suivantes, son travail influença fortement le cercle des surréalistes, qui l'acclama en tant que créateur de la méthode paranoïaque-critique, qui, selon ce qui s'en disait, permettait d'accéder au subconscient, libérant les énergies artistiques créatrices. Breton rendit hommage à cette découverte qui venait de doter le Surréalisme d'un instrument de tout premier ordre en l'espèce la méthode paranoïaque critique qu'il s'est montré d'emblé capable d'appliquer à la peinture, à la poésie, au cinéma, à la construction d'objets surréalistes typiques, à la mode, à la sculpture, à l'histoire de l'art et même le cas échéant, à toute espèce d'exégèse »
André Breton » (Extrait de Wikipedia, article « Dali»)
Sa participation au cinéma surréaliste, et notamment au film de Buñuel « Un chien andalou », dès 1929, fut un atout majeur pour la connaissance de l’artiste par le public.
- Dali s'intéressa aux nouvelles découvertes scientifiques de son époque, à la physique, à la génétique :
« Artiste expérimenté, Dali ne se confinait pas à la peinture. Il expérimenta de nombreux média et procédés nouveaux ou innovants, telles que les peintures par projection ou l'holographie, technique dont il fut l'un des pionniers. Nombre de ses œuvres incorporaient des illusions d'optiques, des calembours visuels, des trompe-l'œil. Il expérimenta aussi le pointillisme, le halftoning (réseau de points semblables à ceux utilisés dans l'impression) et les images stéréoscopiques. Il fut un des premiers à utiliser l'holographie dans l'art. De jeunes artistes comme Andy Warhol proclamèrent que Dali avait une influence importante sur le pop art. » (Article de Wikipedia déjà cité)
- Il fut rapidement reconnu aux Etats-Unis :
« Les Américains furent subjugués par l'excentricité du personnage et les audaces d'un surréalisme qu'ils ne connaissaient alors presque pas. L'exposition à la Galerie Julien Levy eut un franc succès et Dalí comprit que sa réussite passait par les États-Unis. Sa peinture commençait à être appréciée. Edward James - filleul du roi Edouard VII - devint son mécène et lui racheta toute sa production de 1935 à 1936.
En 1941 Dalí envoya un script de cinéma à Jean Gabin Moontide (marée lunaire). À la fin de cette année, la première rétrospective de Dali fut exposé par le Museum of modern art. Ces soixante œuvres - 43 huiles et 17 dessins - parcoururent les États-Unis durant les deux années suivantes. Les huit plus grandes villes accueillirent l'exposition, assurant la notoriété du peintre et bientôt, les propositions commerciales se multiplièrent. S'il n'en accepta que certaines, elles lui permirent d'amasser une fortune certaine qui inspira à Breton l'anagramme féroce « Savador Dali - Avida Dollars » (Wikipedia)
- Il resta figuratif à une époque ou l’art abstrait, plus difficilement compréhensible, s’imposait sur la scène artistique.
- Il a travaillé à la construction de son propre culte, à l’entretien de son propre mythe par une intelligence brillance et un sens inné de la provocation, sachant mettre en scène sa personnalité à la fois exubérante et mystérieuse. On pense à l'utilisation de son image avec sa moustache !
- Avec Gala, ils forment un des couples mythiques de l’histoire culturelle du XXe siècle. Gala fut à la fois épouse et muse. « Elle devient l'unique modèle féminin et le principal sujet d'inspiration du peintre qui ne cessera de la magnifier et de la représenter comme un mythe vivant et une icône moderne. » (Wikipedia, article Gala)
Gala fit l’objet de nombreux écrits.
- Amanda Lear fut son amie et sa muse. En 2004, elle publia Mon Dali à l’occasion du centenaire de la naissance de l’artiste, dans lequel elle évoque sa rencontre et sa vie avec lui.
- Catherine Millet aussi participa à la continuation du « mythe Dali ».
« Dans Dali et moi, (paru en 2005), elle dévoile sans tabous la sexualité de Salvador Dali et ses rapports au corps et au désir. Elle est également l'intervenant principal du documentaire Le Cinéma selon Dali de Marie-Dominique Montel et Christopher Jones sur les théories de Dali dans le cinéma. » (Wikipedia, article Catherine Millet)
- En 1971, Jacques Chancel enregistre une « radioscopie » avec Dali, émission radiophonique particuièrement écoutée.
- Ce document présente une étude universitaire qui aborde la question de la médiatisation de Salvador Dali et permet de voir que celle-ci était très présente.
- Il tourna une publicité une publicité pour les chocolat Lanvin en 1968 : la fameux " Je suis fou du chocolat Lanvin ! "
- Il a été de son vivant décoré de la Grande Croix d’Isabelle la Catholique, la plus haute distinction espagnole. Il est élu en mai 1978 à l’Académie des Beaux-arts de l’Institut de France comme membre associé étranger.
- Son œuvre fut l’objet de la commercialisation de nombreux produits dérivés : montres molles, bijoux, parfums, posters, T-shirts... actuellement toujours en vente.
Autre ouvrage indispensable à la connaissance de l'oeuvre de Salvador Dali : Salvador Dalí, 1904-1989 : l'oeuvre peint
Dali : l'oeuvre et l'homme :
p. 7 : «Le rapport qu’il établit entre son œuvre et son spectateur est un rapport de force : il communique, malgré lui, les fantasmes qui l’aveuglent le paysage qui l’a marqué comme un propriétaire marque ses bêtes au fer rouge, la violence tout espagnole qui coule dans son sang, et dont il est, peut-être, la première victime. »
P. 8 : Il est surréaliste « non par une recherche de l’insolite ou de l’étrange pour l’étrange, mais par cette vitesse technique capable de suivre la matérialisation soudaine de l’image suggérée. Deux univers se superposent chez Dali : celui de la réalité pure, et celui de l’association, de la cohérence objective du monde onirique…. A partir d’une volonté de réalisme, mais s’accompagnant de simulation, de déguisement, Dali va peindre deux tableaux superposables, jouer avec les images premières, suggérer celles qui sont ou ne sont pas visibles au premier coup d’œil. Cette profusion optique, ces permanentes anamorphoses, ces rapprochements en apparence gratuits et irrationnels sont toujours délibérés. Dali n’est pas le peintre du hasard, de la rencontre inopinée, mais du délibéré, du pensé, du logique inexorable. S’il y a un sentiment permanent dans on œuvre, c’est la fatalité. Il a toujours dénoncé « l’intuition logique » mais se soumet à « l’irrationalité » : il cherche à « matérialiser avec la plus impérialiste rage de la précision les images de l’irrationalité concrète."
p. 9 : "Dans son pathologique besoin de protection, il s’est fabriqué un exosquelette mental dont il tire son esthétique : le rapport dur/mou ; le mou, c’est « la viande » : le biologique, le dur, c’est la tête-pensante, la tête-cerveau. En fonction de cette spécification, les thèmes daliniens essentiels seront finalement peu nombreux malgré l’étonnante virtuosité de l’artisan, mais tous chargés de significations bien précises."
Je ne vous cite ici que quelques extraits du texte éclairant de Robert Descharnes, qu’il faut lire en intégralité.
- De plus, il a produit une œuvre protéiforme : tableaux, dessins, gravures, sculptures, bijoux, flacons de parfums : ces derniers objets furent aussi l’occasion de parler de lui… Il fut aussi écrivain, réalisateur, créateurs de décors et de costumes : il investit la scène artistique de toutes parts : il s’intéressa à la mode en collaborant avec Coco Chanel et Chritian Dior, au théâtre avec Peter Brook, réalisa des décors de ballet pour Maurice Béjart, il créa des couvertures de magazines américains pour the American Weekly, Vogue, Town & Country, des pochettes de disques, et travailla pour les collants Bryans Hosiery, la bouteille Perrier, pour Alka Seltzer, pour Datsun. (Source : daliparis.com.)
Il créa aussi, en 1936, le canapé Boca, édité par Gufram, qui connu ensuite plusieurs versions et fit l'objet de déclinaisons (par exemple, la version de Bertrand Lavier réalisée par la Manufacture nationale de Sèvres en porcelaine vernie.)
- Dali et le surréalisme :
La rencontre déterminante avec le surréalisme libère son extraordinaire puissance créative.
« Dali continuait d'exposer régulièrement et rejoignit officiellement le groupe des surréalistes dans le quartier parisien de Montparnasse. Durant les deux années suivantes, son travail influença fortement le cercle des surréalistes, qui l'acclama en tant que créateur de la méthode paranoïaque-critique, qui, selon ce qui s'en disait, permettait d'accéder au subconscient, libérant les énergies artistiques créatrices. Breton rendit hommage à cette découverte qui venait de doter le Surréalisme d'un instrument de tout premier ordre en l'espèce la méthode paranoïaque critique qu'il s'est montré d'emblé capable d'appliquer à la peinture, à la poésie, au cinéma, à la construction d'objets surréalistes typiques, à la mode, à la sculpture, à l'histoire de l'art et même le cas échéant, à toute espèce d'exégèse »
André Breton » (Extrait de Wikipedia, article « Dali»)
Sa participation au cinéma surréaliste, et notamment au film de Buñuel « Un chien andalou », dès 1929, fut un atout majeur pour la connaissance de l’artiste par le public.
- Dali s'intéressa aux nouvelles découvertes scientifiques de son époque, à la physique, à la génétique :
« Artiste expérimenté, Dali ne se confinait pas à la peinture. Il expérimenta de nombreux média et procédés nouveaux ou innovants, telles que les peintures par projection ou l'holographie, technique dont il fut l'un des pionniers. Nombre de ses œuvres incorporaient des illusions d'optiques, des calembours visuels, des trompe-l'œil. Il expérimenta aussi le pointillisme, le halftoning (réseau de points semblables à ceux utilisés dans l'impression) et les images stéréoscopiques. Il fut un des premiers à utiliser l'holographie dans l'art. De jeunes artistes comme Andy Warhol proclamèrent que Dali avait une influence importante sur le pop art. » (Article de Wikipedia déjà cité)
- Il fut rapidement reconnu aux Etats-Unis :
« Les Américains furent subjugués par l'excentricité du personnage et les audaces d'un surréalisme qu'ils ne connaissaient alors presque pas. L'exposition à la Galerie Julien Levy eut un franc succès et Dalí comprit que sa réussite passait par les États-Unis. Sa peinture commençait à être appréciée. Edward James - filleul du roi Edouard VII - devint son mécène et lui racheta toute sa production de 1935 à 1936.
En 1941 Dalí envoya un script de cinéma à Jean Gabin Moontide (marée lunaire). À la fin de cette année, la première rétrospective de Dali fut exposé par le Museum of modern art. Ces soixante œuvres - 43 huiles et 17 dessins - parcoururent les États-Unis durant les deux années suivantes. Les huit plus grandes villes accueillirent l'exposition, assurant la notoriété du peintre et bientôt, les propositions commerciales se multiplièrent. S'il n'en accepta que certaines, elles lui permirent d'amasser une fortune certaine qui inspira à Breton l'anagramme féroce « Savador Dali - Avida Dollars » (Wikipedia)
- Il resta figuratif à une époque ou l’art abstrait, plus difficilement compréhensible, s’imposait sur la scène artistique.
- Il a travaillé à la construction de son propre culte, à l’entretien de son propre mythe par une intelligence brillance et un sens inné de la provocation, sachant mettre en scène sa personnalité à la fois exubérante et mystérieuse. On pense à l'utilisation de son image avec sa moustache !
- Avec Gala, ils forment un des couples mythiques de l’histoire culturelle du XXe siècle. Gala fut à la fois épouse et muse. « Elle devient l'unique modèle féminin et le principal sujet d'inspiration du peintre qui ne cessera de la magnifier et de la représenter comme un mythe vivant et une icône moderne. » (Wikipedia, article Gala)
Gala fit l’objet de nombreux écrits.
- Amanda Lear fut son amie et sa muse. En 2004, elle publia Mon Dali à l’occasion du centenaire de la naissance de l’artiste, dans lequel elle évoque sa rencontre et sa vie avec lui.
- Catherine Millet aussi participa à la continuation du « mythe Dali ».
« Dans Dali et moi, (paru en 2005), elle dévoile sans tabous la sexualité de Salvador Dali et ses rapports au corps et au désir. Elle est également l'intervenant principal du documentaire Le Cinéma selon Dali de Marie-Dominique Montel et Christopher Jones sur les théories de Dali dans le cinéma. » (Wikipedia, article Catherine Millet)
- En 1971, Jacques Chancel enregistre une « radioscopie » avec Dali, émission radiophonique particuièrement écoutée.
- Ce document présente une étude universitaire qui aborde la question de la médiatisation de Salvador Dali et permet de voir que celle-ci était très présente.
- Il tourna une publicité une publicité pour les chocolat Lanvin en 1968 : la fameux " Je suis fou du chocolat Lanvin ! "
- Il a été de son vivant décoré de la Grande Croix d’Isabelle la Catholique, la plus haute distinction espagnole. Il est élu en mai 1978 à l’Académie des Beaux-arts de l’Institut de France comme membre associé étranger.
- Son œuvre fut l’objet de la commercialisation de nombreux produits dérivés : montres molles, bijoux, parfums, posters, T-shirts... actuellement toujours en vente.
Autre ouvrage indispensable à la connaissance de l'oeuvre de Salvador Dali : Salvador Dalí, 1904-1989 : l'oeuvre peint
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter