Question d'origine :
Bonjour,
j'aimerais savoir si le prosélytisme est interdit en France. Je n'ai pas trouvé d'information en ce sens. Si cela est interdit j'aimerais en comprendre la raison. N'est-ce pas contraire à la liberté d'expression? Si j'emmène un juif dans une église chrétienne, je suis hors la loi?
Merci beaucoup et bonne journée
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 28/02/2012 à 09h03
Bonjour,
Comme l’explique le Centre interdisciplinaire d’Etude du Religieux, il est vain de chercher dans nos textes juridiques une référence explicite au prosélytisme. Longtemps, la seule disposition spéciale de droit interne relative au prosélytisme était contenue dans l’article 31 de la loi de 1905, punissant ceux qui, soit par voie de fait, violences ou menaces contre un individu, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi ou d’exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa fortune, l’auront déterminé à exercer ou à s’abstenir d’exercer un culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d’une association cultuelle, à contribuer ou à s’abstenir de contribuer aux frais d’un culte.
Cette absence de référence expresse au prosélytisme ne signifie pas, bien entendu, que notre droit l’ignore, simplement il l’appréhende indirectement à travers la liberté religieuse.
Si la liberté de religion est d’abord liberté du for interne, c’est-à-dire du choix religieux et, à ce titre, liberté fondamentale et absolue, elle est également liberté du for externe, c’est-à-dire liberté de manifester sa foi. C’est la liberté religieuse en action, liberté des attitudes religieuses, liberté de suivre les rites, de pratiquer son culte et de propager sa foi. Dès 1993, la Cour européenne, dans une affaire désormais célèbre, considérait que le prosélytisme est une activité dont l’exercice est protégé au titre de la liberté de croyance religieuse. La liberté religieuse, dit la Cour, comporte en principe le droit d’essayer de convaincre son prochain par la manifestation de ses croyances sans quoi la liberté de changer de religion risquerait de demeurer lettre morte.
La Cour européenne (25 mai 1993) définissait le prosélytisme abusif dans les termes suivants : « une activité offrant des avantages matériels ou sociaux en vue d’obtenir des rattachements à une église, ou exerçant une pression abusive sur des personnes en situation de faiblesse ».
En revanche, no note le cas particulier des agents de l’État, qui doivent, le temps de leur service au moins, renoncer aux manifestations qui, par leur caractère démonstratif, pourraient faire douter de leur attachement à la neutralité de la personne publique qu’ils représentent, affaire traitée par le tribunal administratif de Versailles : il s’agissait, ici, d’une directrice de crèche dont il avait été mis fin au détachement par le maire de la commune au motif qu’elle « avait, dans l’exercice de ses fonctions, encouragé deux de ses agents se trouvant sous sa responsabilité à rejoindre l’église Saint-Denys de la Chapelle et leur avait, à cet effet, remis un livret paroissial ».
De même, le Droit des religions : Dictionnaire consacre une grande partie au prosélytisme et son inscription dans le droit français et international.
Voici en résumé ce qui en est dit :
Aucun texte de droit international ne traite expressément de la question du prosélytisme. Toutefois, l’article 1§2 de la déclaration sur l’élimination de toutes formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion du 25 novembre 1981 précise que « nul ne subira de contrainte pouvant porter atteinte à sa liberté d’avoir une religion ou une conviction de son choix ». Le prosélytisme est ainsi placé implicitement au cœur du libre exercice d’avoir une religion par la disqualification de toute « contrainte ». Le même texte évoque, parmi les critères de la liberté religieuse, la « liberté d’enseigner une religion ou une conviction dans les lieux convenant à cette fin » (…)
Quoiqu’il en soit le prosélytisme trouve sa limite naturelle dans la contrainte, le harcèlement, qui pourraient être exercés sur autrui pour le convaincre d’adopter une religion ou d’en changer.
Pour la France , non règlementé en droit français, le prosélytisme est une composante de la liberté religieuse qui comporte un nombre important de limites.
Le prosélytisme est inhérent à la liberté de religion. Admettre que chacun est libre de croire ou ne pas croire, d’adopter ou de changer de religion et d’exprimer ses croyances, impose de lui reconnaître la liberté d’essayer de convaincre son prochain. Tout croyant va en effet s’efforcer de diffuser la « bonne parole », afin de tenter de faire partager sa foi et de convertir son interlocuteur. A ce titre, le prosélytisme appelle à être garanti en tant que composante de la liberté de religion.
Mais ce prosélytisme peut également connaître des limites :
Tout acte de prosélytisme ne saurait être admissible, car la liberté de convaincre ne saurait porter atteinte aux droits et libertés d’autrui, ainsi qu’aux exigences d’intérêt général que sont l’ordre public, la sécurité, la santé et la moralité publiques. Aussi, dans certains cas, le prosélytisme peut-il être interdit, alors que dans d’autres il importe d’en sanctionner les abus…
Sur le prosélytisme, nous vous recommandons également la lecture du livre Le prosélytisme religieux à l'épreuve du droit privé par Sandrine Plana, 2006 ainsi que de l'ouvrage intitulé Laïcité et liberté religieuse : recueil de textes et de jurisprudence : textes à jour octobre 2011.
Comme l’explique le Centre interdisciplinaire d’Etude du Religieux, il est vain de chercher dans nos textes juridiques une référence explicite au prosélytisme. Longtemps, la seule disposition spéciale de droit interne relative au prosélytisme était contenue dans l’article 31 de la loi de 1905, punissant ceux qui, soit par voie de fait, violences ou menaces contre un individu, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi ou d’exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa fortune, l’auront déterminé à exercer ou à s’abstenir d’exercer un culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d’une association cultuelle, à contribuer ou à s’abstenir de contribuer aux frais d’un culte.
Cette absence de référence expresse au prosélytisme ne signifie pas, bien entendu, que notre droit l’ignore, simplement il l’appréhende indirectement à travers la liberté religieuse.
Si la liberté de religion est d’abord liberté du for interne, c’est-à-dire du choix religieux et, à ce titre, liberté fondamentale et absolue, elle est également liberté du for externe, c’est-à-dire liberté de manifester sa foi. C’est la liberté religieuse en action, liberté des attitudes religieuses, liberté de suivre les rites, de pratiquer son culte et de propager sa foi. Dès 1993, la Cour européenne, dans une affaire désormais célèbre, considérait que le prosélytisme est une activité dont l’exercice est protégé au titre de la liberté de croyance religieuse. La liberté religieuse, dit la Cour, comporte en principe le droit d’essayer de convaincre son prochain par la manifestation de ses croyances sans quoi la liberté de changer de religion risquerait de demeurer lettre morte.
La Cour européenne (25 mai 1993) définissait le prosélytisme abusif dans les termes suivants : « une activité offrant des avantages matériels ou sociaux en vue d’obtenir des rattachements à une église, ou exerçant une pression abusive sur des personnes en situation de faiblesse ».
En revanche, no note le cas particulier des agents de l’État, qui doivent, le temps de leur service au moins, renoncer aux manifestations qui, par leur caractère démonstratif, pourraient faire douter de leur attachement à la neutralité de la personne publique qu’ils représentent, affaire traitée par le tribunal administratif de Versailles : il s’agissait, ici, d’une directrice de crèche dont il avait été mis fin au détachement par le maire de la commune au motif qu’elle « avait, dans l’exercice de ses fonctions, encouragé deux de ses agents se trouvant sous sa responsabilité à rejoindre l’église Saint-Denys de la Chapelle et leur avait, à cet effet, remis un livret paroissial ».
De même, le Droit des religions : Dictionnaire consacre une grande partie au prosélytisme et son inscription dans le droit français et international.
Voici en résumé ce qui en est dit :
Aucun texte de droit international ne traite expressément de la question du prosélytisme. Toutefois, l’article 1§2 de la déclaration sur l’élimination de toutes formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion du 25 novembre 1981 précise que « nul ne subira de contrainte pouvant porter atteinte à sa liberté d’avoir une religion ou une conviction de son choix ». Le prosélytisme est ainsi placé implicitement au cœur du libre exercice d’avoir une religion par la disqualification de toute « contrainte ». Le même texte évoque, parmi les critères de la liberté religieuse, la « liberté d’enseigner une religion ou une conviction dans les lieux convenant à cette fin » (…)
Quoiqu’il en soit le prosélytisme trouve sa limite naturelle dans la contrainte, le harcèlement, qui pourraient être exercés sur autrui pour le convaincre d’adopter une religion ou d’en changer.
Pour la France , non règlementé en droit français, le prosélytisme est une composante de la liberté religieuse qui comporte un nombre important de limites.
Le prosélytisme est inhérent à la liberté de religion. Admettre que chacun est libre de croire ou ne pas croire, d’adopter ou de changer de religion et d’exprimer ses croyances, impose de lui reconnaître la liberté d’essayer de convaincre son prochain. Tout croyant va en effet s’efforcer de diffuser la « bonne parole », afin de tenter de faire partager sa foi et de convertir son interlocuteur. A ce titre, le prosélytisme appelle à être garanti en tant que composante de la liberté de religion.
Mais ce prosélytisme peut également connaître des limites :
Tout acte de prosélytisme ne saurait être admissible, car la liberté de convaincre ne saurait porter atteinte aux droits et libertés d’autrui, ainsi qu’aux exigences d’intérêt général que sont l’ordre public, la sécurité, la santé et la moralité publiques. Aussi, dans certains cas, le prosélytisme peut-il être interdit, alors que dans d’autres il importe d’en sanctionner les abus…
Sur le prosélytisme, nous vous recommandons également la lecture du livre Le prosélytisme religieux à l'épreuve du droit privé par Sandrine Plana, 2006 ainsi que de l'ouvrage intitulé Laïcité et liberté religieuse : recueil de textes et de jurisprudence : textes à jour octobre 2011.
DANS NOS COLLECTIONS :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter