Réponse du service Guichet du SavoirA propos des conditions de vie des esclaves dans les navires négriers au XVIIIè siècle, vous pouvez consulter plusieurs ressources en ligne :
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Le Bateau négrier ou l’anticipation du « Paradis cauchemardesque » sur le site
gensdelacaraibe.org. L'auteur de l'article, Koumba Gélase, présente les passages du roman
Canto Gemido de Eliseo Altunaga et - de là - établit une analyse fine de ces conditions.
"[...] le bateau négrier dans Canto de gemido que Altunaga appelle ironiquement la Bonté [...] En effet, durant la traversée, alors que le pont du navire symbolise la domination et la supériorité des négriers, le ventre du navire (Edouard Glissant), exprime au contraire l’infériorité et l’enfer des esclaves. [...] les esclaves, entassés et enchaînés dans la cale sont privés des conditions sanitaires et hygiéniques les plus élémentaires. [...] L’entassement et le confinement de tous ces esclaves dans la cale de ce navire génèrent ces odeurs nauséabondes. Ce qui laisse penser que ces esclaves ont déjà passé plusieurs jours dans cette cale sans être « aspergés d’eau » comme c’était la coutume lors des grandes traversées [...] Dans les bateaux négriers, les capitaines ont un pouvoir absolu sur les marins et les esclaves. Ce sont eux qui décident, par exemple, des heures pendant lesquelles les marins doivent nourrir et laver les esclaves. [...] L’exaspération de ces marins face au travail qu’ils considèrent comme dégradant, à savoir aller dans la cale du navire pour le nettoyer, y faire sortir les cadavres, des moribonds et faire face aux révoltes qui y explosent [...] Même s’ils ne sont pas victimes des violences, des horreurs et des humiliations que les esclaves captifs subissent [...] Ce phénomène s’explique car dans un bateau négrier, les capitaines prenaient le soin de ne pas mettre ensemble les esclaves de la même ethnie ou parlant la même langue pour éviter les révoltes. Ainsi, comme nous pouvons l’imaginer, le bateau négrier a contribué non seulement à l’horreur vécue par les Noirs mais aussi au brouillage linguistique dont ils ont été victimes comme le souligne Edouard Glissant dans Sartorius, le roman de Batoutos [...] Pour Glissant le bateau négrier a constitué ainsi un espace de résistances, il a signé la séparation irréversible d’avec «l’avant pays» de ces noirs. L’esclave enfourné dans le «ventre du navire» est un «Migrant nu» (Edouard Glissant) c’est à dire un captif sans instruments traditionnels de musique, sans objets de culte, ni masques contrairement au «Migrant fondateur» occidental qui lui arrive avec ses chansons , ses traditions , ses outils et l’image de son Dieu. Privé de toute possibilité de retour, dépouillé de tout du pays d’avant, ce «Migrant Nu» n’en a gardé que des traces conservées par la mémoire, mais à partir desquelles il a pu inventer son adaptation au monde inconnu où il a été débarqué. [...]"La bibliographie utilisée par l'auteur de cet article mentionne :
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Esclaves et négriers de Jean Meyer
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Les négriers ou le trafic des esclaves d'André Ducasse
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Durée du voyage et conditions de vie des captifs à bord du bateau négrier sur le site
ladograve.comCe site conçu par Hubert Gravelot consacre de nombreux chapitres à l'histoire de la Guadeloupe et notamment au commerce triangulaire.
" [...] EN ROUTE VERS LE NOUVEAU MONDE : Durée du voyage et conditions de vie des captifs à bord du bateau négrier
[...] Le trajet durait 3 à 6 semaines.
Dans les cales du bateau de nombreux esclaves meurent à cause des maladies qui se propagent car ils vivent serrés et entassés les uns sur les autres: il pouvait y avoir jusqu'à 600 hommes sur un bateau.
Plus de trois quart du chargement ne résistait pas à ce traitement [...] Les hommes peuvent sortir de leur cale deux fois par mois enchaînés. Au coucher du soleil ils sont mis en place pour la nuit , rangés comme des cuillères.
CONDITIONS DE VIE DES FEMMES SUR UN BATEAU NEGRIER
Les femmes et les enfants sont autorisés à circuler à bord.
Une demi - heure avant le coucher du soleil....
Elles regagnent les cales après avoir été minutieusement fouillées.
CAPTIFS MALADES...
Les mauvaises conditions de vie à bord du bateau sont des vecteurs facilitant la propagation de maladies diverses:
Variole, Scorbut, Dysentrie, gangrène, Lèpre etc... Le chirurgien ne disposant que de médiocres outils, les malades sont jetés à la mer afin de limiter le risque de perdre la cargaison.
REVOLTE A BORD D'UN BATEAU NEGRIER
Les mutineries ne sont pas rares sur les bateaux négriers... ...mais elles échouent presque toujours, et elles sont réprimées dans le sang. Il y a aussi des cas où la révolte réussit. Comme les "Captifs " ne peuvent diriger un bateau aussi complexe qu'un grand voilier, ces navires errent à travers les mers jusqu'à la mort de tous les occupants." *
La vie sur un bateau négrier sur le site
touristmartinique.comL'article semble plus évoquer le début du XIXe siècle mais fournit des éléments intéressants à propos de règlements valables à bord des négriers.
" [...] De nombreux règlements ont été édités pour régler la vie à bord du bateau négrier. L'article 7 du règlement des frères Portier en donne une idée : «Il faut faire manger soir et matin ayant soin qu' entre les repas la chaudière soit bien nettoyée». La soupe est servie à 9 heures le matin et à 4 heures de l'après-midi ; c'est une espèce de brouet insipide, épaissi avec de la farine de maïs ou du riz rehaussé de piment pour stimuler l'appétit, les rendre moins sujets aux coliques et au dévoiement. Le chirurgien doit goûter la soupe, doit veiller à ce qu'elle ne soit point avalée trop chaude. On pourra, le jeudi et le dimanche, leur distribuer un petit coup d'eau de vie ; si l'on est content et que tout va bien, on pourra leur donner le dimanche une galette de biscuit et un petit morceau de boeuf.
S'il y en a qui ne mangent pas ou le font avec dégoût, le chirurgien devra chercher la cause, car beaucoup ne se plaignent pas, et au besoin, les nourrir de force. Il devra leur visiter la bouche, faire faire des gargarismes avec du jus de citron ou du vinaigre à ceux qui ont la bouche échauffée, toucher avec la pierre de vitriol les petits chancres qui pourraient s'y trouver.
Jacques Savary, dans «Le parfait négociant» recommandait de faire danser les nègres et de les tenir gais tout au long du chemin car «l'exercice assouplit les membres, éloigne le scorbut et l' ennui et le chant donne la gaieté, vrai baume de santé». On emportait donc des tambours à bord. Il fallait aussi les occuper, on leur donnait donc à tresser des paniers, des sandales et enfiler des perles de couleur...
A la fin de la journée, on prévoit le retour à l'entrepôt après vérification des fers. Il leur est interdit de bouger jusqu'au lendemain et il est aussi interdit aux matelots d'entrouvrir les panneaux quoiqu'ils puissent entendre.
Seulement qu'en est-il dans la réalité ? Tout ceci n'est valable que s'il y a beau temps et que la traversée se passe sans mauvaises rencontres avec les pirates. Autrement les esclaves restent bloqués dans l'entrepont et il arrive que pendant une traversée, ils ne montent que trois fois sur le pont ! [...]"Pour compléter les informations précédentes, nous vous conseillons la lecture d'un ouvrage disponible à la
bibliothèque municipale de Lyon :
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Le commerce colonial triangulaire, XVIIIe-XIXe siècles de Raymond-Marin Lemesle
Certains extraits explicitent les conditions dans lesquelles se déroulaient le voyage à bord des négriers.
"Les équipages comprenaient les officiers, les capitaines, les chirurgiens, les aumôniers, les charpentiers, les tonneliers, les matelots, les mousses et les novices. [...] Les capitaines des navires négriers étaient à la fois navigateurs, agents d'affaires et geôliers. [...] La fonction de chirurgien était généralement assurée par de très jeunes hommes dépourvus d'expérience. [...] Lui seul pouvait découvrir et signaler au capitaine les âges, l'état de santé et la force de résistance des Noirs. [...] En pleine mer les coups de force étaient souvent dus à l'initiative des captifs les plus instruits. Il s'estimaient assez compétents pour ramener le navire vers les côtes. [...] Bien entendu l'équipage ne se laissait pas faire. Si les révoltés montaient à l'assaut, c'étaient à coup de fusil qu'ils étaient abattus [...] La mutinerie terminée, les captifs étaient remis aux fers et parqués entre la cale et le pont supérieur dans les entreponts. Ces parcs ne dépassaient pas 1,50 m de hauteur, c'est dire que les captifs devaient toujours rester couchés ou assis, avec très peu d'espace entre eux.
A ces révoltes s'ajoutaient les maladies qui frappaient indistinctement Blancs et Noirs : c'était le grand fléau des expéditions de traite. En tenant compte de ces maladies, des pertes en rade des colonies et des révoltes 'la moyenne des décès des captifs était de 7 à 8%'.
- - La situation des esclaves [...] sur le pont du navire négrier, les Noirs étaient encore des captifs."Vous pouvez approfondir vos recherches avec les ouvrages suivants, également accessibles à la
bibliothèque municipale de Lyon :
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La Traite des nègres sous l' Ancien régime avec la collaboration de Patricia Crété
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La route des esclaves, négriers et bois d'ébène au XVIIIe siècle de Pierre Pluchon
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Les bateaux négriers, roman-document de Thorkild Hansen
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Journal d'un négrier au XVIIIe siècle de William Snelgrave (présentation de l'ouvrage sur
nonfiction.fr)