Question d'origine :
Madame, Monsieur,
J’effectue actuellement un travail sur l’interaction entre l’environnement et les barrages hydroélectriques notamment sur l’influence de l’environnement sur les barrages.
Dans cette optique j’ai recherché quels étaient les facteurs environnementaux qui déterminaient le type d’ouvrage. J en actuellement trouvés deux :
• La morphologie de la vallée :
- Pour une vallée large, on construira plutôt un barrage à contreforts ou multivoûtes.
- Pour une vallée étroite, on construira plutôt un barrage voûte.
J’aimerai donc savoir dans quel cas on construira un barrage poids-voûte, un barrage poids ou un barrage en remblai.
• La nature géologique de la vallée :
- Pour des matériaux trop compacts on construira un à contreforts ou multivoûtes.
- Pour une des matériaux résistant constituant le sol, on construira plutôt un barrage poids
Enfin j’aimerai savoir si il existe d autres facteurs environnementaux.
Merci d’avance pour l’immense travail qui sera fournit pour répondre à cette question. Et en vous souhaitant une journée agréable et productive.
Cordialement Max Lincoln
Réponse du Guichet
bml_sci
- Département : Sciences et Techniques
Le 14/11/2006 à 10h36
«Les caractéristiques du site où sera construit le barrage sont les données essentielles pour la conception de l'ouvrage. En dehors des conditions climatiques, il s'agit principalement de l'hydrologie du cours d'eau qui sera barré, de la topographie de sa vallée et de la géologie.
L'hydrologie
L'objectif d'un barrage étant de stocker un certain volume d'eau pour diverses utilisations, il faut donc se préoccuper, d'une part, des conditions de remplissage de la réserve envisagée et, d'autre part, de veiller à ce que l'ouvrage ne soit pas un obstacle au passage des crues qui risqueraient de le submerger. Pour cela, il faut étudier les apports mensuels, saisonniers et annuels et les débits instantanés pour définir les crues maximales pouvant entrer dans la retenue. Si les données sont suffisantes, on utilise des méthodes statistiques directes. Si cela n'est pas le cas, il faut étendre l'information par corrélation avec d'autres données disponibles comme la pluviométrie ou le régime de bassins similaires. Toutes ces études demandent de grandes précautions pour couvrir les incertitudes des données.
La topographie
Les renseignements topographiques nécessaires concernent à la fois le bassin-versant de la retenue, dont la morphologie intervient dans les études hydrologiques, la vallée de la rivière à l'amont et à l'aval du barrage, le site de ce dernier et celui de la retenue, et les zones d'emprunts des matériaux qui seront utilisés pour la construction des ouvrages.
La géologie
Les études géologiques et géotechniques donnent des informations concernant la nature des matériaux qui constituent la fondation du barrage ou les berges de la retenue, leurs caractéristiques mécaniques et leur étanchéité, aussi bien en surface qu'en profondeur. Elles nécessitent la réalisation de travaux de reconnaissance dont le coût peut être très important. »
Les types de barrages
« Les barrages en béton peuvent appartenir à plusieurs catégories :
- Les barrages-poids, ouvrages massifs s'opposant par leur poids à la poussée de l'eau du lac.
- Les barrages-voûtes qui, incurvés en plans, s'arc-boutent sur les flancs de la vallée : lorsque la vallée s'élargit, leur domaine d'application a une limite qui recule progressivement depuis un demi-siècle grâce aux progrès de la technique. Actuellement, à titre d'ordre de grandeur, on situe cette limite, par exemple pour un barrage d'une centaine de mètres de hauteur, à des vallées dont la largeur au couronnement est de l'ordre de six fois la hauteur de l'ouvrage.
- Les barrages à contreforts, constitués par une série de grands murs triangulaires parallèles au lit du cours d'eau et liés entre eux à l'amont par une paroi assurant la bouchure. Du fait de leur constitution répétitive, ces ouvrages sont applicables, comme les barrages-poids, à toute vallée quelle qu'en soit la largeur. »
Source : Encyclopaedia Universalis
Dans les Techniques de l'ingénieur , encyclopédie technique, tout un chapitre est consacré aux barrages. En voici quelques extraits :
« Les barrages dans leur environnement : conditions naturelles d’un site
Données hydrologiques
L’étude hydrologique du bassin versant (cf. articles Modèles mathématiques en hydrauliques et en hydrologie dans ce traité et Mesures et hydrologie de surface dans le traité Mesures et Contrôle) permet de définir les apports moyens du cours d’eau , exprimés en hm3 /an ou en m3 /s, et leurs variations probables à une échelle de temps saisonnière ou interannuelle. Quel que soit le but de l’aménagement, il s’agit d’informations primordiales pour établir la faisabilité et déterminer le volume souhaitable du réservoir. Ces données sont entachées d’une incertitude d’autant plus grande que la région du futur ouvrage est peu développée.
Par ailleurs, l’étude hydrologique fournit également le volume et le débit maximal des crues très rares , qu’il faut considérer pour tous les ouvrages, même ceux n’ayant en principe aucun rôle de protection contre les crues : on impose généralement que le barrage une fois construit soit en mesure de supporter une crue ayant une période de récurrence de 10 000 ans (cela surtout pour les barrages en remblai qui ne peuvent supporter une submersion sans risque de ruine).
Par extension, l’étude hydrologique comprend également les informations sur le régime des transports solides de la rivière , dus à l’érosion des sols du bassin versant ; on évalue ainsi la rapidité de comblement de la « tranche morte » du réservoir.
Données topographiques
Un site de barrage, au sens topographique, se place sur un verrou , resserrement de la vallée situé juste en aval d’une cuvette naturelle susceptible, une fois fermée, de constituer un réservoir de volume suffisant.
Une fois fixée approximativement la position envisagée pour le barrage, la cuvette est définie par un graphique sur lequel sont portés la surface et le volume en fonction de la cote du plan d’eau ; il servira à définir la hauteur souhaitable du barrage (c’est-à-dire celle qui sera adoptée, sous réserve que toutes les autres conditions, notamment géotechniques, soient satisfaites).
La forme du site proprement dit influe sur le choix du type de barrage ; on peut réduire cette forme à deux caractéristiques : la largeur relative (L /H ), qui varie en pratique de 1 à 4, parfois plus ; et la forme en U (vallées glaciaires dans nos régions) ou en V.
Données géologiques et géotechniques
La constitution même d’une retenue d’eau requiert du massif dans lequel elle est située des propriétés minimales en matière d’étanchéité naturelle ; il serait en effet très coûteux de généraliser l’étanchement artificiel à tout le fond du bassin, et de telles réalisations sont exceptionnelles.
Par ailleurs, chaque type de barrage requiert des propriétés mécaniques minimales spécifiques en matière de déformabilité et de résistance des appuis , lorsque ceux-ci sont soumis :
• aux forces appliquées directement par le barrage ;
• aux forces internes induites par la percolation de l’eau au sein de la fondation.
Tout projet de barrage commence donc par une étude géologique, géophysique et géotechnique (cf. article Géotechnique. Mécanique des sols et des roches dans ce traité) qui est progressivement affinée au fur et à mesure que le projet se développe et que les choix se précisent sur le type et la hauteur du barrage. Le géologue intervient en premier lieu pour expliquer la nature et la structure du site, mettre en évidence les principales incertitudes ; les reconnaissances géotechniques par sondages, galeries de reconnaissances, prélèvements, essais de laboratoire et essais in situ sont réalisées pour lever les inconnues.
Ces études aboutissent à la détermination de la nature des différentes formations (sols ou roches) présentes sur le site, leur extension géométrique, leurs propriétés en matière de perméabilité, déformabilité, résistance mécanique, altérabilité à l’eau ; les discontinuités (failles, fractures, diaclases, zones de dissolution ou karsts) sont recherchées avec le plus grand soin.
Données sismologiques
L’étude, sur une base historique ou déterministe (sismotectonique), de la sismicité du site est entreprise et aboutit à la définition de deux séismes de référence :
• le séisme de projet , que l’ouvrage doit être en mesure de supporter sans aucun dommage ;
• le séisme maximal probable , auquel le barrage doit pouvoir résister sans ruine ni mise hors service de ses organes de sécurité.
Chacun d’eux est défini par un niveau d’accélération et un spectre de fréquence, qui serviront dans les calculs de la structure (cf. article Constructions parasismiques dans ce traité).
Conditions générales d’environnement
D’autres natures de données, moins importantes dans la mesure où elles n’influent que rarement sur la faisabilité d’un barrage, sont toutefois indispensables pour mener le projet à son terme : citons notamment les conditions climatiques (températures extrêmes, gel), qui constituent des sollicitations supplémentaires du futur ouvrage, les propriétés chimiques de l’eau , parfois agressive vis-à-vis de certains matériaux notamment le béton, la disponibilité de matériaux de construction de qualité à proximité, les accès , etc. »
Les différents barrages :
« Le barrage poids est l’un des types les plus anciens et il en existe un grand nombre dans les pays industrialisés. Construits en maçonnerie jusqu’au XIXe siècle, puis en béton au début du XXe ils ont connu une certaine désaffection en raison de leur volume et de leur coût relatif, jusqu’au développement récent de la technique du béton compacté au rouleau (BCR) qui leur a donné une nouvelle jeunesse depuis 1980). Par ailleurs, ils présentent, quel que soit leur mode de construction, une solution attrayante lorsqu’il faut intégrer au barrage des structures relativement importantes, comme une usine hydroélectrique, un gros évacuateur de crues, une écluse, etc. À noter que la quasi-totalité des barrages de basse chute qui équipent les grands fleuves européens sont des barrages de type poids.
Les problèmes potentiels sont de trois ordres : déformabilité, résistance, étanchéité.
Si le sol est trop déformable , les tassements sous le poids de l’ouvrage et ensuite les mouvements sous la poussée horizontale seront difficilement supportés par la structure monolithique d’un barrage poids, même équipé de joints, d’où un risque de fissures anarchiques ; cela exclut pratiquement les fondations non rocheuses, voire même les roches faibles (craies, marnes), sauf cas d’ouvrages modestes. De même, une forte inclinaison des poussées n’est pas acceptable par des fondations non rocheuses ; lorsqu’on ne peut pas faire autrement (barrages en rivière sur dépôts sableux, par exemple), il est nécessaire de dimensionner très largement le barrage en vue de réduire les inclinaisons des forces et, par ailleurs, de renforcer le massif d’appui par des caissonnements de parois moulées ou palplanches.
En matière d’étanchéité , il s’agit d’une part de réduire les fuites en fondations susceptibles de diminuer la rentabilité de l’aménagement, mais surtout de réduire autant que possible le risque de sous-pressions déstabilisatrices.
Un barrage voûte est une structure dont la forme est dessinée de façon à transmettre les efforts de poussée de la retenue vers les rives. Dans un schéma simplifié, c’est une superposition d’arcs horizontaux chargés chacun à leur extrados par la pression p correspondant à leur profondeur… Les barrages voûtes trouvent leur place idéale dans les sites relativement étroits (ratio largeur en crête/hauteur inférieur à 4), lorsque la qualité des fondations est excellente, surtout sur les rives. Aujourd’hui, ils sont souvent préférés à tous les autres types pour les sites de grande hauteur.
La structure de type voûte a été incorporée dans des ouvrages plus complexes conçus pour répondre à des conditions topographiques particulières. Lorsque la partie haute des rives se révèle, d’un point de vue topographique ou géotechnique, un peu juste, on réalise une ou deux culées : il s’agit de massifs pesants, sortes de barrages poids aptes à supporter une partie de la poussée de la voûte, en plus de la poussée directe de l’eau de la retenue ; on peut aussi associer une voûte avec une aile à contreforts, comme au barrage de Roselend (France). Le cas extrême est constitué par le barrage à voûtes multiples : il s’agit d’une juxtaposition de contreforts, sur la face amont desquels s’appuient des voûtes indépendantes les unes des autres ; de tels ouvrages, qui ont quelque similitude avec les barrages à contreforts, s’accommodent bien de vallées larges ; il faut souligner toutefois que leur comportement complexe est fortement affecté par les conditions extérieures – climatiques et sismiques notamment ; cela explique en partie la désaffection dont ils sont l’objet.
Par souci de clarté, l’essentiel de ce paragraphe concerne les barrages en terre , qui constituent l’archétype des barrages en remblai et dans lesquels les deux fonctions : étanchéité, d’une part, et résistance à la poussée de l’eau, d’autre part, sont assurées par des matériaux naturels de type « sol » judicieusement organisés.
Les barrages en remblai de terre ont la grande qualité de s’accommoder de fondations meubles qui seraient incapables de supporter un ouvrage en béton ; cela permet d’équiper les sites dont le fond de vallée est garni, éventuellement sur de fortes épaisseurs (100 m ou plus), d’alluvions ou de roches décomposées, déformables et plus ou moins perméables. En première approche, une bonne règle générale est que la fondation d’un barrage doit disposer des propriétés, naturelles ou obtenues par traitement, au moins équivalentes à celles du corps du barrage qu’elles doivent recevoir. Ils constituent donc une bonne solution lorsque des matériaux de qualité convenable sont disponibles à proximité immédiate. Leur défaut essentiel est une très grande vulnérabilité au déversement par-dessus leur crête, la ruine survenant très rapidement par érosion superficielle et interne de leur partie aval. Il convient donc de dimensionner très largement les organes de protection contre les crues qui leur sont associés, et d’être très prudents lorsqu’on n’est pas sûr des données hydrologiques en matière de crues. »
Sur Internet
- l’article de Wikipedia apporte également beaucoup d’informations.
- Structurae dresse un inventaire des barrages dans le monde.
Pour en savoir plus
- Les barrages
- Les barrages : conception et maintenance
- La conception des barrages : conférence également accessible sur Internet
- Les barrages-réservoirs en France
- Constructions hydrauliques
- Barrages des Alpes
France Lozere Villefort Le barrage Photographie prise par GIRAUD Patrick Août 2005 (commons.wikimedia.org)
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