Question d'origine :
Bonjour,
lors d'une conversation, j'ai appris que les Mormons considéraient que tous les chrétiens appartenaient à leur secte; et que, par ailleurs, ils allaient régulierement jeter un oeil dans les registres cléricaux pour copier la liste des baptisés, et les ajouter à la leur. Cela dit en passant, voici un bon moyen d'accroître le nombre de ses fidèles. Mais l'affaire est grave: cela concernerait même les gens morts, depuis des siècles!
Pouvez-vous me dire si cela est vrai, et si il est possible de se faire radier de ces registres?
Merci pour votre travail.
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 24/03/2006 à 12h00
Les Mormons, (qu’il conviendrait de nommer plutôt Saints des Derniers Jours), sont bien connus des généalogistes pour offrir énormément de renseignements d’état civil grâce à leur politique systématique de reproduction des registres paroissiaux et d’état civil de toutes les parties du monde et notamment de l’Europe. Ils le font avec l’accord des services d’Archives et en conformité avec la loi des pays concernés. Ils font ainsi la joie de certains chercheurs comme on peut le voir sur le site de généalogie GeneaGuide :
« Quel rapport entre les Mormons et la généalogie ?
La religion des Mormons est caractérisée par l'importance exceptionnelle qu'ils donnent à la famille. Dans leur croyance, les liens familiaux ne se dissolvent même pas après la mort. Mais la condition du maintien de ces liens est de faire partie de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours. Pour permettre à tous ceux qui, nés avant la " révélation " du Livre de Mormon, n'ont pu être initiés, les Mormons ont prévu de pouvoir baptiser rétroactivement leurs ancêtres. Pour cela, il faut les connaître et s'organiser en conséquence pour mener des recherches. La généalogie est donc d'abord une motivation religieuse, ce qui n'exclut pas bien entendu l'intérêt personnel.[…]
La Bibliothèque Généalogique (" Family History Library ")
La Bibliothèque Généalogique de Salt Lake City représente l'un de ces moyens de recherche que les Mormons ont mis sur pieds et ouvert gratuitement à tous les chercheurs intéressés, quelles que soient leur croyance et leur nationalité. La Bibliothèque est une émanation de la Société Généalogique de l'Utah, fondée en 1894. […]
Depuis les années soixante en France, beaucoup plus tôt dans certains autres pays européens, les Mormons ont organisé, avec l'accord des autorités de tutelle des services d'archives, le microfilmage systématique des registres paroissiaux et d'état-civil. Ceci répond à la nécessité évoquée plus haut de pouvoir recenser le maximum d'ancêtres afin de les baptiser. C'est un travail de Romain. En France, près de 45% des départements sont micro-filmés. L'état du microfilmage peut être consulté sur le 36 15 SDJ. Il est aussi publié de temps en temps dans la presse généalogique. La plupart des départements de l'Est et du Nord ainsi que plusieurs départements du Midi sont terminés. Une quinzaine d'autres, de diverses régions, sont actuellement en cours de micro-filmage. […]. Les opérations continuent régulièrement et les microfilmages sont aussi repris pour les départements déjà terminés au fur et à mesure que de nouveaux registres deviennent légalement accessibles. En effet, les Mormons n'ont pas de privilège particulier et ne peuvent microfilmer que les registres que les lois locales permettent normalement de consulter. En France, ce délai est de cent ans. »
La Bibliothèque généalogique des Mormons à Salt Lake City
« Les Mormons ont entrepris depuis plusieurs années de microfilmer les registres paroissiaux et d'état-civil de notre pays, ce en accord avec les Archives de France. »
Liste des départements Français dont les registres paroissiaux et d'état civil ont été microfilmés par les Mormons.
Voir aussi le site Généafrance
L’extrait de l’article de Wikipédia ici reproduit explique l’accord des pays dont les archives sont microfilmées :
« L'Église est connue pour son interêt pour la généalogie. Cet intérêt est suscité par la volonté de chacun de retrouver ses ancêtres et de les baptiser a posteriori.
Cette volonté se traduit notamment par l'élaboration de la norme GEDCOM et par la recherche d'actes anciens, notamment grâce à la technologie du microfilm. Une grande partie des documents microfilmés dans les diverses archives publiques de France sont le fruit du travail de la Société généalogique d'Utah. Celle-ci se voit accorder le droit d'accès et de copie en échange d'un exemplaire du microfilm. Malgré les interrogations que soulève "le baptême a posteriori", les pays dont les archives sont microfilmées font l'économie d'un travail de plusieurs décennies. »
Article Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours dans Wikipedia
Cette politique soulève d’une part un problème de libertés depuis la parution du site de recherche généalogique de l’Eglise mormone.
« Avec le Net, l'accord conclu en 1987 semble d'ores et déjà enfreint par les mormons. Il stipulait que «le but essentiel du microfilmage» était de permettre aux membres de l'Eglise «d'identifier leurs ancêtres afin de leur administrer dans leurs temples des rites religieux». Que l'utilisation des microfilms était «réservée» aux mormons. Et qu'enfin la société généalogique de Salt Lake City s'engageait à n'effectuer «aucune copie des microfilms sans l'autorisation de l'Etat français». Une diffusion en ligne change évidemment la donne. A ce jour, aucun contrôle n'a été effectué sur le fichage réalisé par les mormons, mais une réflexion d'ordre éthique et juridique doit s'engager dès septembre [2000] entre le ministère de la Culture et la Commission nationale informatique et liberté (Cnil). »
Mormons sur un site de prévention contre les sectes.
Le problème qui se pose ensuite est que cette politique est en effet liée à une de leurs croyances dont on peut trouver l’explication sur un site « sympathisant »:
« Baptême pour les morts : Des milliards d'Etres humains n'ont jamais eu l'occasion d'entendre parler du Christ ou de son Evangile. Seront-ils condamnés pour autant? Les SDJ ("Mormons") croient que le "baptême pour les morts" (ou "baptême par procuration", ou "baptême post-mortem") est le moyen par lequel le Seigneur met cette ordonnance salvatrice à disposition de tous ses enfants. Un détenteur de la Prêtrise baptise (devant témoins) un frère ou une soeur de l'Eglise (déjà baptisée) en faveur d'une personne décédée.
Cette doctrine a créé beaucoup d'émoi dans les milieux sensationalistes ou mal informés, mais une approche impartiale ne laisse pas planer de doute quant à son bien-fondé éthique: selon la croyance des SDJ, le baptême n'est pas imposé à la personne décédée; son esprit survit après la mort, et elle est pleinement consciente d'elle-même. Lorsqu'un baptême est effectué en sa faveur, elle a le choix, là où son esprit est, d'accepter ou de rejeter cette ordonnance, puisque l'Evangile lui est enseigné (voir 1 Pierre 3:18-19, 4:6). »
In Article Baptême du lexique SDJ-Mormons
Pendant longtemps, les baptêmes étaient effectués sur les ascendants des membres des Saints des derniers jours, (on immerge le descendant, qui symbolise la lignée), mais il semblerait que la pratique se soit étendue à une grande partie des noms récoltés, ce qui bien sûr, posent des problèmes éthiques et religieux dont les articles ci-dessous vous donneront une idée :
“L’International Genealogical Index (IGI) :
Tout généalogiste connaît l’existence des mormons et sait qu’il peut avoir accès, grâce à eux, à la quasi-totalité des archives d’état civil françaises et étrangères sur microfilms. Certains, moins nombreux, connaissent aussi l’existence de l’IGI. Cet index a l’ambition de constituer une base de données généalogique où le maximum de personnes pourraient être enregistrées de façon à pouvoir établir des liens entre elles. D’après la LDS, près de 2 milliards de noms seraient déjà dans cette gigantesque base. On pourrait donc penser que l’on a enfin là « l’arme absolue » du généalogiste.
Cependant toute recherche généalogique, comme tout travail historique, ne peut être réalisé que d’après des sources clairement identifiées et vérifiées. Tout recours à des données collectées par d’autres nécessite donc que l’on s’interroge sur la façon dont ces données ont été obtenues, de façon à s’assurer de leur fiabilité.
Or quel est le but de ce gigantesque index et qui le constitue ? Il faut pour cela se rappeler certaines croyances des Mormons. Ils croient que les esprits de ceux qui sont morts continuent à penser et à faire des choix. C’est à leurs descendants qu’il appartient de leur proposer la possibilité du baptême mormon. Ils doivent donc chercher à réunir les familles pour l’éternité en procédant à des rites de rapprochement qui sont en fait des baptêmes par procuration de leurs ancêtres ; officiellement, ils disent ne pas procéder à des baptêmes, mais seulement offrir par procuration le baptême à leurs ancêtres décédés, qui sont sensés pouvoir accepter ou non ce baptême. Chaque membre de la LDS demande ainsi à ce que tous ses ancêtres et parents soient inscrits dans l’IGI. Il procède ensuite à leur « baptême » par procuration. Le nom de l’ancêtre apparaît alors dans l’IGI avec la mention « christening » et la date du baptême. L’IGI est donc avant tout un outil destiné à effectuer, au sein de la LDS, des rites de rapprochement conformément aux croyances de cette secte.
Le baptême des Juifs
Tout cela n’aurait pas réellement porté à conséquence si les membres de la LDS s’étaient effectivement limités à baptiser leurs ancêtres directs. Or en 1990, il apparut que les noms de milliers de juifs victimes de la Shoa figuraient dans l’IGI. Parmi eux, 380 000 y étaient mentionnés "christening" ».
Avons-nous des ancêtres Mormons
Voir aussi cet autre résumé de la situation :
Mormons : nouvel engagement de ne plus baptiser des juifs défunts
Cet article doute que les Corses apprécient davantage ces baptêmes :
Les Mormons veulent baptiser les défunts insulaires.
Et la recension d’articles à la page Mormons du site de l’UNADFI (Union Nationale de Défense des Familles et de l’Individu victimes des sectes), montre (notamment dans le résumé de l’article du Parisien : Les Mormons héritent des archives départementales) que des associations de laïques s’indignent aussi de cette pratique. Vous trouverez le texte intégral des articles à la page Mormons du site de prévention contre les sectes déjà cité. A noter que les Mormons ne sont pas considérés comme une secte par la Commission parlementaire française.
Quant à être rayé des listes, vous avez pu constater que vous-même ne pouvez vous y trouver (voir ci-dessus sur le délai de 100 ans). L’article « Avons-nous des ancêtres mormons » ci-dessus propose par ailleurs l’adresse d’un responsable à qui écrire. Enfin, vous pouvez envoyer un mail directement à l’Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours
Pour approfondir :
Mon voyage au pays des Mormons – Fabrice Andrieux
Site officiel France de l’Eglise des saints des derniers jours
Les livres de la Bibliothèque Municipale de Lyon sur les Mormons
DANS NOS COLLECTIONS :
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