Question d'origine :
Bonjour,
On trouve aujourd'hui dans de nombreux textes de philosophie, de sociologie et de psychologie le mot : "subjectivation".
J'aimerais savoir quand exactement est apparu ce mot. Qui l'a inventé ? Sous la plume de quels chercheurs ou écrivains célèbres le retrouve-t-on, dans les années 70 notamment (je sais qu'on le trouve chez Michel Foucault...)
Merci beaucoup !!!
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 22/11/2005 à 15h37
Subjectivation n. f ; - 1937 ; de subjectif, d’après objectivation.
Litt. Fait de devenir subjectif, de prendre un caractère plus subjectif.
« (…) il se pourrait que, dans ce domaine, le jeu de substitution d’une personne à une autre (…) tende à une légitimation de plus en plus forte de l’aspect physique de l’être aimé, et cela en raison même de la subjectivation toujours croissante du désir. » A ; Breton, L’amour fou, p. 11 .
« (…) la médiation entre l’homme et le monde s’objective en objet technique comme elle se subjective en médiateur religieux ; mais cette objectivation et cette subjectivation opposées et complémentaires sont précédées par une première étape de la relation au monde, l’étape magique, dans laquelle la médiation n’est encore ni subjectivée ni objectivée, ni fragmentée ni universalisée, et n’est que la plus simple et la plus fondamentale des structurations du milieu d’un vivant : la naissance d’un réseau de points privilégiés d’échange entre l’être et le milieu. » Gilbert Simondon, Du mode d’existence des objets techniques, p. 164.
Le grand Robert de la langue française
Pour une approche de la notion de Processus de subjectivation chez Foucault, nous nous reporterons à l’article qui lui est consacré dans le Vocabulaire de Foucault :
Le terme de « subjectivation » désigne chez Foucault un processus par lequel on obtient la constitution d’un sujet, ou plus exactement d’une subjectivité. Les « modes de subjectivation » ou « processus de subjectivation » de l’être humain correspondent en réalité à deux types ‘d’analyse : d’une part les modes d’objectivation qui transforment les êtres humains en sujets – ce qui signifie qu’il n’y a de sujets qu’objectivés, et que les modes de subjectivation sont en ce sens des pratiques d’objectivation ; de l’autre, la manière dont le rapport à soi à travers un certain nombre de techniques permet de se constituer comme sujet de sa propre existence.
Foucault repère dans un premier temps trois modes de subjectivation principaux : « les différents modes d’investigation qui cherchent à accéder au statut de science » comme l’objectivation du sujet parlant en grammaire ou en linguistique, ou encore celle du sujet productif dans l’économie et l’analyse des richesses ; les « pratiques divisantes », qui divisent le sujet à l’intérieur de lui-même (ou par rapport aux autres sujets) pour le classer et en faire un objet – comme la division entre le fou et le sain d’esprit, le malade et l’homme en bonne santé, le brave homme et le criminel, etc. ; enfin, la manière dont le pouvoir investit le sujet en se servant non seulement des modes de subjectivation déjà cités mais en en inventant d’autres : c’est tout l’enjeu des techniques de gouvernementalité. Dans un second temps, la question de Foucault semble se renverser : s’il est vrai que les modes de subjectivation produisent, en les objectivant, quelque chose comme des sujets, comment ces sujets se rapportent-ils à eux-mêmes ? Quels procédés l’individu met-il en œuvre afin de s’approprier ou de se réapproprier son propre rapport à soi ?
C’est à partir de ce dernier point que Foucault se livre par exemple à l’analyse détaillée des hupomnêmata, et plus généralement de l’écriture privée entre l’antiquité classique et les premiers siècles de l’ère chrétienne : dans tous les cas, il s’agit de comprendre les modalités d’un rapport à soi qui passe par la mise en pratique sans cesse recommencée d’un procédé d’écriture de soi et pour soi, c’est-à-dire d’un procédé de subjectivation. Mais alors que pour les hupomnêmata grecques « il s’agissait de se constituer soi-même comme sujet d’action rationnelle par l’appropriation, l’unification et la subjectivation d’un déjà-dit fragmentaire et choisi, dans le cas de la notation monastique des expériences spirituelles, il s’agira de débusquer de l’intérieur de l’âme es mouvements les plus cachés de manière à pouvoir s’en affranchir ».(p. 60-62)
A la rubrique « Sujet / subjectivité » du même ouvrage vous pouvez lire :
L’affirmation que le sujet a une genèse, une formation, une histoire, et qu’il n’est pas originaire, a sans doute été très influencée chez Foucault par la lecture de Nietzsche, de Blanchot et de Klossovski, et peut-être aussi par celle de Lacan ; elle n’est pas indifférente à l’assimilation fréquente du philosophe au courant structuraliste dans les années 60, puisque la critique des philosophies du sujet se retrouvent aussi bien chez Dumézil, chez Lévi-Strauss, ou chez Althusser. Le problème de la subjectivité, c’est-à-dire « la manière dont le sujet fait l’expérience de lui-même dans un jeu de vérité où il a rapport à soi » devient alors le centre des analyses du philosophe : si le sujet se constitue, ce n’est pas sur le fond d’une identité psychologique mais à travers des pratiques qui peuvent être de pouvoir ou de connaissance, ou bien par des techniques de soi. (p. 62-63)
Pour une approche très générale de la question, vous pouvez consulter ce site consacré à la philosophie.
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