Loi du talion
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 21/09/2005 à 21h15
2267 vues
Question d'origine :
J'aimerais savoir par qui et quand elle a été appliquée pour la première fois, bref , quelle en est l'origine. Merci.
Réponse du Guichet
anonyme
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 23/09/2005 à 09h41
Étymologie
Le mot talion a pour origine talis, ce qui en latin signifie « tel » ou « pareil ».
Les premiers signes de la loi du talion ont été trouvés dans le Code d'Hammourabi, en 1730 avant Jésus Christ, dans le royaume de Babylone. Cette loi a permis d'éviter que les personnes ne se fassent justice elles-même et ainsi d'introduire un début d'ordre dans la société en ce qui concerne le traitement des crimes
Un flou d'interprétation subsiste en ce sens qu'il n'est nulle part précisé clairement qu'elle ne représente que le maximum autorisé de la riposte. Certaines interprétations la présentent au contraire comme la riposte adéquate, ce qui peut conduire à des violences et contre-violences n'ayant jamais de fin.
Considérée dans ce dernier cas comme barbare, injuste, et de toute façon contraire aux intérêts de l'ordre public, elle fut remplacée pour certains crimes par des amendes pécuniaires ou des peines d'emprisonnement, que l'on peut considérer comme les premières peines alternatives.
Elles ne satisfont pas pour autant forcément la victime, et on peut sans doute repenser à la sagesse du pionnier Daniel Boone qui, élu juge par ses concitoyens, prononçait au contraire des peines de réparation, centrées sur la victime et non sur le malfaiteur. Ainsi, celui qui avait blessé un cheval se voyait condamné à tirer la charrue à sa place jusqu'à ce que la bête en soit à nouveau capable.
Aujourd'hui
La plupart des codes de lois occidentaux actuels ont renoncé à la Loi du Talion, considérée comme inadéquate à assurer la paix sociale. Les peines prononcées ont en principe pour but et de compenser le moins mal possible les dommages subis par la victime et de préparer la réinsertion de l'agresseur dans la société au bout d'un temps plus ou moins long.
Loi du Talion et la peine de mort
La Loi du Talion est utilisée comme argument par des partisans de la peine de mort, qui considèrent qu'une personne qui a tué, mérite la mort, seule peine équitable selon eux. Voir l'article peine de mort.
La Loi du Talion en religion
Dans le Coran
Sourate II, verset 178 : « Ô les croyants! On vous a prescrit le talion au sujet des tués : homme libre pour homme libre, esclave pour esclave, femme pour femme. Mais celui à qui son frère aura pardonné en quelque façon doit faire face à une requête convenable et doit payer des dommages de bonne grâce. Ceci est un allégement de la part de votre Seigneur et une miséricorde. Donc, quiconque après cela transgresse, aura un châtiment douloureux ».
Dans la Bible
En premier lieu, la loi du Talion est associé au blasphème et édictée dans l'Ancien Testament :
Exode 21,23-25 « Mais si malheur arrive, tu paieras vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure, blessure pour blessure, meurtrissure pour meurtrissure.»
Lévitique, 9,17-22 : « Si un homme frappe à mort un être humain, quel qu'il soit, il sera mis à mort. S'il frappe à mort un animal, il le remplacera - vie pour vie. Si un homme provoque une infirmité chez un compatriote, on lui fera ce qu'il a fait : fracture pour fracture, œil pour œil, dent pour dent; on provoquera chez lui la même infirmité qu'il a provoqué chez l'autre. Qui frappe un animal doit rembourser; qui frappe un homme est mis à mort. Vous aurez une seule législation : la même pour l'émigré et pour l'indigène.»
Mais cependant, la vision donnée dans le Nouveau Testament diffère :
Matthieu 5,38-42 : « Vous avez appris qu'il a été dit : œil pour œil et dent pour dent. Et moi, je vous dis de ne pas résiter au méchant. Au contraire, si quelqu'un te giffle sur la joue droite, tends-lui aussi l'autre. A qui veut te mener devant le juge pour prendre ta tunique, laisse aussi ton manteau. Si quelqu'un te force à faire mille pas, fais-en deux mille avec lui. A qui te demande, donne; à qui veut t'emprunter, ne tourne pas le dos.»
Il ne s'agit plus de rendre, mais de donner. Pour les chrétiens la loi du Talion n'est donc pas la vengeance.
Loi du talion et légitime défense
De nos jours encore, le concept de légitime défense qui doit être proportionnée à l'attaque semble une émanation directe de la Loi du Talion.
source : Wikipedia.
à compléter avec des sites comme Hemes ; espace-citoyen.be, etc...
Réponse du Guichet
anonyme
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 05/10/2005 à 09h42
Pour compléter notre première réponse, nous vous citons quelques extraits de Encyclopaedia Universalis, consultable à la BML :
Système répressif qui consiste à punir l'offense d'une peine identique à cette offense (talion vient du latin talis, tel). On l'exprime souvent par la formule du Lévitique (XXIV, 20) : « Œil pour œil, dent pour dent. » Cette stricte réciprocité traduit un sentiment de vengeance, mais d'une vengeance qui n'est plus discrétionnaire. Le talion se situe donc dans un régime répressif qui n'est plus celui de la seule vengeance privée et où déjà une autorité supérieure intervient, au moins pour en contrôler la mise en œuvre, voire pour prononcer la peine. Le talion est signalé dans les paragraphes 196, 197, 200, 210 du code d'Hammourabi, souverain de Babylone (~ 1728-~ 1686). Au contraire, dans la collection de règles juridiques désignée sous le nom de Code hittite, qui nous renseigne sur le droit appliqué en Asie Mineure au ~ XIVe siècle, le talion est déjà remplacé par des peines pécuniaires. Le Lévitique, composé au ~ Ve siècle, mais qui conserve des éléments beaucoup plus anciens, fait encore une place au talion. Le talion fut également pratiqué dans la Grèce archaïque. La tradition attribuait à Zaleucos, le législateur de Locres en ~ 663, son introduction à côté des compositions pécuniaires, pour remplacer la vengeance privée. Vers ~ 600, dans la législation de Charondas à Catane, le talion cède la place à des actions en justice qui tendent à la réparation du préjudice subi par la victime et au paiement d'une amende à la cité. À Rome, la loi des Douze Tables (milieu du ~ Ve s.) signale encore le talion pour un membre brisé, mais seulement si les parties n'ont pu se mettre d'accord sur une autre forme de réparation du préjudice (VIII, II). Le talion disparut de bonne heure, remplacé par des condamnations pécuniaires (Aulu-Gelle, Nuits attiques, XX, I, 37). Mais on trouve au Bas-Empire une pratique qui s'inspire quelque peu de l'idée du talion. Pour lutter contre le fléau des accusations téméraires, dans certains procès pénaux, le droit du Bas-Empire décida que l'accusateur qui ne pouvait faire la preuve de ses allégations s'exposait à la peine qui aurait frappé celui qu'il accusait. À la suite des invasions germaniques, alors que la vengeance privée tendait à reprendre une place laissée libre par la défaillance de la justice publique, le talion réapparut. Si la restauration d'une justice d'État entraîna à nouveau son déclin, on ne saurait affirmer que l'idée du talion ne subsista pas, plus ou moins consciemment, dans l'opinion populaire lorsqu'il s'agissait d'« apprécier » la peine.
[...]
Dans les anciennes sociétés, le sang de la victime crie vengeance contre celui qui l'a versé. La vendetta est la réponse à ce cri ; la famille ou la tribu prend en charge de rétablir l'ordre rompu par le crime en accomplissant une justice compensatrice et réparatrice que les dieux eux-mêmes réclament. Mais peu à peu on voit les codes réglementer cette vengeance familiale, afin d'approprier le châtiment au crime commis et du même coup de protéger aussi les coupables contre l'excès d'une vengeance démesurée et interminable. Dans la Bible par exemple, Caïn, bien que coupable, est défendu contre ceux qui voudraient le tuer (Genèse, IV, 15), alors qu'au contraire Lamek est le symbole d'une colère insatiable (Genèse, IV, 23-24). Quand naît l'État, la peine de mort est très fréquemment réglementée. Le code d'Hammourabi (2285-2242 av. J.-C.) énumère les diverses mises à mort par le feu, l'eau et le pal. Les livres du Lévitique et de l'Exode sont remplis de motifs de mises à mort (pour meurtre, rapt en vue de mise en esclavage, mais aussi idolâtrie, sorcellerie, non-observance des lois rituelles, enfin adultère, inceste, sadisme, bestialité, prostitution). Habituellement, la lapidation, parfois accompagnée d'exposition, accomplit la sentence, l'ensemble de la communauté participant à l'exécution du jugement qui exprime la colère de Dieu contre ceux qui ont rompu le pacte collectif d'obéissance et de service. La loi du talion domine avec sa catégorique réciprocité : « Tu donneras vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure, blessure pour blessure, meurtrissure pour meurtrissure » (Exode, XXI, 24-25).
Cependant, le droit d'asile vient briser ce terrible enchaînement. Il donne leur chance aux criminels de retarder leur extermination et aux poursuivants de réfléchir davantage sur les circonstances du crime et sur l'avenir des coupables. Par le biais des sacrifices et des amendes, on voit se développer tout un système de substitutions qui remplace l'urgence de la vengeance mortelle par des compensations rituelles et financières. L'obligation de mettre à mort est, pourrait-on dire, transférée sur d'autres porteurs, en particulier sur des animaux offerts en expiation. L'interdit, que le crime a fait peser sur la communauté, est levé par des procédures où jouent à la fois la justice et la miséricorde ; que les cités de refuge ou les sanctuaires soient toujours de nature religieuse indique bien que les dieux prévoient pour l'homme une possibilité de payer pour sa faute, sans succomber à la mort. La condition à la mise en œuvre de ces procédures est qu'il existe un accord profond entre le coupable, qui avoue et supplie d'une part, et la communauté, qui accepte la survie et l'expiation d'autre part. La peine de mort a toujours ici des implications collectives ; quels que soient donc la durée, l'indistinction personnelle et souvent le ritualisme terrible de ces anciens codes, ils expriment une vérité profonde, de plus en plus oubliée aujourd'hui : un criminel continue d'appartenir à la société. Son crime la menace en son entier s'il demeure impuni. Mais son rétablissement la guérit en entier s'il est accepté de nouveau. La solidarité entre la société et ses criminels n'est jamais rompue. La réintégration du coupable est toujours le but visé.
Deux facteurs importants vont peu à peu jouer : le droit romain et le développement du christianisme. Par le moyen de la citoyenneté, le droit romain étend la protection juridique à certaines catégories d'habitants de l'Empire. Les recours diminuent la menace imminente de la peine de mort. Pour aboutir à celle-ci, il faut au préalable obtenir la levée de l'immunité que représente la citoyenneté (capitis amissio). De plus, les besoins économiques favorisent la condamnation aux travaux forcés, par exemple dans les mines de sel, en remplacement de la peine capitale. Ce processus reprend, au sein de l'Empire, le passage, dans les sociétés archaïques, de l'extermination des prisonniers de guerre à leur réduction en esclavage. C'est presque toujours par la découverte de substituts, plus humains ou simplement plus avantageux économiquement pour le corps social, que la peine de mort s'est trouvée historiquement réduite. Pourtant la fin de l'Empire, avec les troubles internes et les menaces externes, verra plutôt s'accroître le recours à la condamnation capitale. Il faut constater que le christianisme n'a pas exercé ici d'influence sur la législation. Avant Constantin, l'Église, sporadiquement persécutée, civilement loyaliste, ne modifie pas l'ambiance générale, même si les communautés chrétiennes organisent des confréries de secours aux prisonniers comme aux esclaves. Après Constantin, les sanctions pénales sont souvent renforcées pour lutter contre les ébranlements de l'ordre social. Le christianisme a soit accepté la punition légale comme anticipation du juste jugement de Dieu (Romains, XIII, 4), soit constaté que la violence appelle la violence (« tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée », Matthieu, XXVI, 52), soit supporté l'injustice avec patience et espérance (I Pierre, II, 8-17). Il n'a pas modifié les législations de manière notable, bien que le souvenir de Jésus-Christ, crucifié aux côtés de deux malfaiteurs, ait toujours favorisé la compassion envers les coupables. Il faudra attendre cependant de nombreux siècles pour que cette compassion s'inscrive dans une autre compréhension de la justice pénale. L'humanisme philosophique jouera d'ailleurs ici un rôle plus important que la théologie chrétienne.
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter