Question d'origine :
Pour un soldat de ma famille, le site SHD indique : "en arrière le 31 janvier 1814".
Pouvez-vous me dire ce que signifie cette expression et quelle différence avec "manque à l'appel" ?
En particulier, cette indication dans la colonne "date et motif de la cessation de service" signifie-t-elle qu'il s'agit de sa date présumée de décès ?
Merci
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 25/05/2016 à 16h08
Bonjour,
Nos recherches font apparaître que les soldats dits « restés en arrière » sont en fait ceux qui n’ont pas suivi leur régiment à la date indiquée, principalement par incapacité (malades, trop épuisés pour marcher, blessés que l’on n’a pas pu conduire à l’hôpital, cavaliers ayant perdu leur cheval …), ou ceux tout simplement qui ne sont pas là lors de l‘appel ; ils sont souvent présumés faits prisonniers et « rayés » s’ils ne réapparaissent pas. D’autres documents laissent à penser qu’il peut aussi s’agir de déserteurs qui n’auraient pas été dénoncés comme tels. Comme vous allez le voir ci-après, la date n’est pas forcément celle présumée de leur mort mais celle de leur « disparition ». Ils peuvent aussi avoir été fait prisonniers, être rentrés chez eux, s’être installés ailleurs, être réintégrés plus tard. Disons que les soldats ainsi caractérisés sont ceux dont on ne sait pas ce qu’ils sont devenus.
« Si le corps du soldat n’a pas été retrouvé et qu’un doute sur son décès peut subsister, trois témoignages affirmant avoir vu la mort du militaire sont requis. Ce qui explique la présence, dans les états d’effectifs, de mentions du genre « resté en arrière » ou « n’a pas reparu au corps », mentions inscrites faute de témoins assurant un décès. »
Les soldats d’Empire au quotidien, Jean-Pierre Mir
« Malgré les instructions détaillées reproduites au début de chaque volume sur la nécessité d'indiquer clairement les destins, la colonne qui leur est consacrée n'est pas toujours scrupuleusement remplie. Les sorts « incertains» sont de plus en plus nombreux dans les générations jeunes. Il est difficile de préciser le sort des soldats qui battent en retraite. Avec les prisonniers, nous avons classé, peut-être trop hâtivement, les soldats «restés en arrière». Cette expression peut désigner des hommes tombés au pouvoir de l'ennemi, et aussi des déserteurs ».
Source : Pertes de l’armée de terre sous le premier Empire, d’après les registres matricules, Jacques Houdaille, Population, n°1, 1972.
Voir aussi le paragraphe « estimation du retour des disparus » p. 38 et suivantes : les « rayés » et les « prisonniers » (où sont classés par l’auteur les « en arrière ») ont pu retourner chez eux, ou ailleurs, sans mention dans le registre matricule.
Voir les exemples de soldats « en arrière » sur la page personnelle : Haspres : soldats de l’Empire et de la Révolution :
« Dumas Caffiaux, né le 11/12/1791 à Haspres, fils de Michel et de Marie Marguerite Meriaux. Exerce la profession de tisserand. Conscrit de l'an 1811. Arrive le 26/05/1811 au 72° régiment de ligne. Fusilier au 4° bataillon, 2° compagnie. Fait la campagne de 1811. En arrière du 25/07/1812, présumé prisonnier de guerre. Rayé le 30/09/1812.
Adrien Morelle, né le 04/03/1791 à Haspres, fils de Jean (mulquinier) et de Marie Augustine Beloy. Exerce la profession de mulquinier. Conscrit de l'an 1811. Arrive au corps le 20/02/1813 au 56° régiment de ligne. Fusilier au 2° bataillon, 6° compagnie. Rayé des contrôles le 10/11/1813, étant en arrière le 16/09/1813 en Saxe. »
Plus explicite sur les causes de cette catégorie « en arrière », un petit tableau de l’ « Etat officiel de l’armée française au retour de Russie :
« Laissés en arrière, soit gelés ou accablés de fatigue et de maladie, et probablement faits prisonniers : 1 officier, 204 soldats »
« Laissés en arrière, soit gelés ou malades, et probablement faits prisonniers : 13 officiers, 201 soldats »
L’Europe pendant le consulat et l’Empire de Napoléon
La page L’organisation divisionnaire sous le premier empire, conférence de Diego Mané, sur le site Planete Napoleon p.15 peut nous aider à comprendre la différence entre « manque à l’appel » et « resté en arrière » :
Après Wagram, il est noté, « Le reste soit les 4/5e de l’ensemble, manque alors à l’appel. 6500 hommes sont donc tombés morts ou blessés au cours de l’avance, ou, selon l’expression consacrée, sont « restés en arrière».
Ceux qui manque à l’appel sont donc tous ceux qui ne sont plus là : ceux dont on sait qu’ils sont morts ou blessés, et ceux dont on ne sait rien, les « restés en arrière ».
Il semble difficile de faire la part des déserteurs dans ces « restés en arrière » mais il semble que le cas puisse se retrouver. Dans l’article : Au crépuscule De l’Empire, l’exemple du 151e régiment d’infanterie de ligne, Jean-François Brun, Revue historique des armées, n° 273, 2014, on peut lire à l’ Annexe n° 2 en note pour la case « restés en arrière » : « Déserteurs et traînards sont bien évidemment inclus dans cette catégorie. »
Voir aussi : La lutte contre les maraudeurs et les débandés lors de la campagne de 1814, Revue Napoleonica, n°1, 2014, p. 68
Bonnes lectures !
Nos recherches font apparaître que les soldats dits « restés en arrière » sont en fait ceux qui n’ont pas suivi leur régiment à la date indiquée, principalement par incapacité (malades, trop épuisés pour marcher, blessés que l’on n’a pas pu conduire à l’hôpital, cavaliers ayant perdu leur cheval …), ou ceux tout simplement qui ne sont pas là lors de l‘appel ; ils sont souvent présumés faits prisonniers et « rayés » s’ils ne réapparaissent pas. D’autres documents laissent à penser qu’il peut aussi s’agir de déserteurs qui n’auraient pas été dénoncés comme tels. Comme vous allez le voir ci-après, la date n’est pas forcément celle présumée de leur mort mais celle de leur « disparition ». Ils peuvent aussi avoir été fait prisonniers, être rentrés chez eux, s’être installés ailleurs, être réintégrés plus tard. Disons que les soldats ainsi caractérisés sont ceux dont on ne sait pas ce qu’ils sont devenus.
« Si le corps du soldat n’a pas été retrouvé et qu’un doute sur son décès peut subsister, trois témoignages affirmant avoir vu la mort du militaire sont requis. Ce qui explique la présence, dans les états d’effectifs, de mentions du genre « resté en arrière » ou « n’a pas reparu au corps », mentions inscrites faute de témoins assurant un décès. »
Les soldats d’Empire au quotidien, Jean-Pierre Mir
« Malgré les instructions détaillées reproduites au début de chaque volume sur la nécessité d'indiquer clairement les destins, la colonne qui leur est consacrée n'est pas toujours scrupuleusement remplie. Les sorts « incertains» sont de plus en plus nombreux dans les générations jeunes. Il est difficile de préciser le sort des soldats qui battent en retraite. Avec les prisonniers, nous avons classé, peut-être trop hâtivement, les soldats «restés en arrière». Cette expression peut désigner des hommes tombés au pouvoir de l'ennemi, et aussi des déserteurs ».
Source : Pertes de l’armée de terre sous le premier Empire, d’après les registres matricules, Jacques Houdaille, Population, n°1, 1972.
Voir aussi le paragraphe « estimation du retour des disparus » p. 38 et suivantes : les « rayés » et les « prisonniers » (où sont classés par l’auteur les « en arrière ») ont pu retourner chez eux, ou ailleurs, sans mention dans le registre matricule.
Voir les exemples de soldats « en arrière » sur la page personnelle : Haspres : soldats de l’Empire et de la Révolution :
« Dumas Caffiaux, né le 11/12/1791 à Haspres, fils de Michel et de Marie Marguerite Meriaux. Exerce la profession de tisserand. Conscrit de l'an 1811. Arrive le 26/05/1811 au 72° régiment de ligne. Fusilier au 4° bataillon, 2° compagnie. Fait la campagne de 1811. En arrière du 25/07/1812, présumé prisonnier de guerre. Rayé le 30/09/1812.
Adrien Morelle, né le 04/03/1791 à Haspres, fils de Jean (mulquinier) et de Marie Augustine Beloy. Exerce la profession de mulquinier. Conscrit de l'an 1811. Arrive au corps le 20/02/1813 au 56° régiment de ligne. Fusilier au 2° bataillon, 6° compagnie. Rayé des contrôles le 10/11/1813, étant en arrière le 16/09/1813 en Saxe. »
Plus explicite sur les causes de cette catégorie « en arrière », un petit tableau de l’ « Etat officiel de l’armée française au retour de Russie :
« Laissés en arrière, soit gelés ou accablés de fatigue et de maladie, et probablement faits prisonniers : 1 officier, 204 soldats »
« Laissés en arrière, soit gelés ou malades, et probablement faits prisonniers : 13 officiers, 201 soldats »
L’Europe pendant le consulat et l’Empire de Napoléon
La page L’organisation divisionnaire sous le premier empire, conférence de Diego Mané, sur le site Planete Napoleon p.15 peut nous aider à comprendre la différence entre « manque à l’appel » et « resté en arrière » :
Après Wagram, il est noté, « Le reste soit les 4/5e de l’ensemble, manque alors à l’appel. 6500 hommes sont donc tombés morts ou blessés au cours de l’avance, ou, selon l’expression consacrée, sont « restés en arrière».
Ceux qui manque à l’appel sont donc tous ceux qui ne sont plus là : ceux dont on sait qu’ils sont morts ou blessés, et ceux dont on ne sait rien, les « restés en arrière ».
Il semble difficile de faire la part des déserteurs dans ces « restés en arrière » mais il semble que le cas puisse se retrouver. Dans l’article : Au crépuscule De l’Empire, l’exemple du 151e régiment d’infanterie de ligne, Jean-François Brun, Revue historique des armées, n° 273, 2014, on peut lire à l’ Annexe n° 2 en note pour la case « restés en arrière » : « Déserteurs et traînards sont bien évidemment inclus dans cette catégorie. »
Voir aussi : La lutte contre les maraudeurs et les débandés lors de la campagne de 1814, Revue Napoleonica, n°1, 2014, p. 68
Bonnes lectures !
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