Question d'origine :
Rue Mercière, il y a au n°48, au dessus de la porte d'entrée un inscription :
au maillet d'argent 1639.
Savez vous à quoi elle correspond ?
Merci...
Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 12/11/2005 à 13h55
Jusqu'à la révolution, les maisons des rues de Lyon ne possèdent pas de numérotation. Celle-ci ne sera adoptée qu'à la fin du XVIIIe siècle, bien après Paris. C'est entre autre pour cette raison que jusqu'aux grands travaux du Préfet Vaïsse les rues sont souvent assez courtes. Pour permettre au voyageur de s'orienter, il n'était pas rare de voir, dans les Annuaires de la Ville, les adresses s'accompagner d'indications permettant de faciliter les recherches : "Monsieur X, rue Saint-Jean, près la place du Gouvernement", par exemple.
Parallèlement, l'usage des enseignes permettait également de distinguer une maison d'une autre, tradition qui s'est conservée jusqu'à la fin du XIXe siècle pour le commerce de détail : A la Reine des tilleuls, A la Grosse rose, A la pensée, A la Bressane, etc., dénominations qui s'invitaient parfois au frontispice des livres, comme pour les ouvrages de l'imprimeur Benoist Coral qui se vendaient "en rue Mercière, à la Victoire" (comprendre "à l'enseigne de la Victoire")
Au milieu du XIXe siècle, Lyon conservait encore dans ses rues un grand nombre d'enseignes. Steyert, dans une série d’articles parus en 1855 dans Le Magasin pittoresque (p.263-264 ; p.287-288 ; p.347-350), en dénombre à cette date environ 80 dont la plupart remontent au début du XVIe siècle. L'une des plus anciennes encore en place était celle du n°1 de la rue Saint-Jean.
Essentiellement destinées à orner les façades des établissements privés, quelques enseignes ont même donné leur nom à des voies publiques: rue de la Lune (actuelle rue Tupin), rue Raisin (actuelle rue Jean-de-Tournes), rue des Trois-Carreaux (actuelle partie nord de la rue de Brest), rue Bât-d'Argent, rue de l'Arbre-Sec, rue des Trois-Maries, rue du Boeuf, etc.
Pouvant être placées au milieu des grilles qui ferment les portes d'entrée, voire même en ornement sur l'imposte - comme c'est le cas pour l'enseigne de la Toison d'Or au 24 de la rue Lanterne (voir image en pièce jointe) - , chacune d'entre elles raconte une histoire, quelque fois accompagnée d'une devise, comme pour l'enseigne des de Tournes, célèbres imprimeurs lyonnais, sur laquelle on pouvait lire: Ne vis alteri feceris quod tibi fieri non vis (Ne faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas qui vous fût fait). La plupart des enseignes ont cependant disparu lors des rénovations successives du Vieux-Lyon et de la presqu'île à l'époque du Second Empire.
Pour revenir à votre question initiale, la rue Mercière, comprise entre Rhône et Saône, reliait la place d'Albon à la place des Jacobins. Elle était dédiée au commerce, notamment aux imprimeurs, mais on y rencontrait également d'autres industries comme des merceries, des quincailliers, et, dans la partie nord de la rue (autrefois Petite rue Mercière), des bijoutiers, joailliers ou graveurs qui occupaient les étages supérieurs des maisons, les seuls où il y avait de la lumière en plein jour.
Si nous avons retrouvé dans les collections de la Bibliothèque de nombreuses études sur les enseignes (voir ci-dessous), aucune ne semble pourtant s'attarder sur celle qui vous intéresse. Seul John Grand-Carteret dans L'Enseigne à Lyon, qui constitue l'une des études les plus complètes sur le sujet, suggère une origine possible à l'enseigne gravée en creux du Maillet d'argent : elle aurait appartenu à un libraire, sans autre précision (voir p.158). Quant à Nizier Du Puitspelu (pseud. de Clair Tisseur), il suggère qu'un maillet aurait été représenté au centre du fronton, puis masqué par une enseigne moderne, et enfin recouvert d'une peinture vert-bronze noyant la gravure dans la couleur.
Sources :
- L'Enseigne à Lyon, par John Grand-Carteret, dessins de Gustave Girrane, Lyon, Histoire locale, 1999 (1ère éd. 1902)
- "Les Enseignes de Lyon" par Louis Arago dans Lyon vu de Fourvière, Lyon, Boitel, p. 295-311.
Si le sujet vous intérèsse, sachez que ce livre est disponible sur Gallica, bibliothèque numérique de la BNF
- "Recherches sur les enseignes curieuses de Lyon", série de 3 articles par Steyert parus en 1855 dans Le Magasin pittoresque
- "Histoire lyonnaise. Nos vieilles enseignes", série d'articles par Nizier Du Puitspelu parus dans La Revue du siècle (n° de mai, juin, août 1893; février et mai 1894), repris et augmentés dans Coupons d'un atelier lyonnais, Lyon, Storck, 1898, p. 91-178
"Au Maillet d'Argent", dessin par G. Giranne, dans L'Enseigne à Lyon, par John Grand-Carteret
Pièces jointes
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Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 12/11/2005 à 14h46
Enseigne de la Toison d'Or, 24 rue Lanterne, représentant un agneau suspendu par une chaîne et portant l'inscription "à la toison d'or, 1693", photographie par Jules Sylvestre (BM Lyon, Fonds Sylvestre, S 2625)
Pièces jointes
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