Critères matériels permettant de déterminer la propriété
Le 19/11/2020 à 11h21
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Question d'origine :
Bonjour, Je cherche à identifier les critères matériels permettant de déterminer la propriété d'un mur séparant deux fonds. Et notamment quelle valeur accorder à l'inclinaison des tuiles couvrant le mur de séparation en pisé, ou tout autre indice matériel en l'absence de toutes indications dans les titres de propriété. Ceci pour la ville de Lyon, car les usages diffèrent d'une région à l'autre à ma connaissance. Pourriez vous m'aider ? Cordialement Arthur Drouin
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 20/11/2020 à 14h02
Bonjour,
Si nous comprenons bien, vous cherchez à prouver le caractère privatif d’un mur séparant deux propriétés. Nous vous laissons dans un premier temps consulter cette page de la préfecture du Rhône : Mur mitoyen. Nous y lisons notamment les précisions suivantes :
«Dans quel cas un mur est-il mitoyen ?
Définition générale
Un mur mitoyen est un mur qui sépare :
• 2 bâtiments appartenant à 2 propriétaires distincts,
• ou entre cours et jardins appartenant à 2 propriétaires distincts,
• ou entre enclos dans les champs appartenant à 2 propriétaires distincts.
À NOTER
un mur peut être mitoyen en totalité, ou seulement sur une partie.
Exception
Toutefois, le mur n'est pas mitoyen s'il existe :
• une pente unique à son sommet,
• ou des tuiles ou corniches d'un seul côté.
Dans ces 2 cas, le mur est réputé appartenir exclusivement au propriétaire du côté duquel se trouve la pente, les tuiles ou les corniches.
La preuve de la non mitoyenneté peut également être apportée :
• par un titre de propriété,
• ou par prescription (si un seul des voisins entretient ou répare le mur pendant 30 ans, voire 10 ans si elle acquiert le bien de bonne foi et détient un juste titre). »
Voici en outre les informations que nous trouvons dans l’ouvrage Servitudes et mitoyenneté : le guide pratique :
«La présomption de non-mitoyenneté : les marques de construction
Certaines marques de construction peuvent aller dans le sens du caractère privatif du mur, et donc contrer la présomption de mitoyenneté. Il s’agit de détails dans la construction du mur qui donnent à penser, en l’absence d’autres éléments plus probants comme un titre de propriété ou une prescription, que le mur appartient à un seul des deux voisins. Est ainsi considéré comme non-mitoyen le mur sur lequel existe un certain nombre de signes extérieurs visibles établissant que le mur est privatif.
L’article 654 du Code civil énonce des marques de non-mitoyenneté :
- Le sommet du mur n’a qu’une pente : il appartient alors au propriétaire vers le terrain duquel la pente est inclinée. Cette règle est liée à celle concernant l’écoulement des eaux de pluie. Le propriétaire d’un mur privatif doit obligatoirement faire tomber les eaux sur son terrain. Le mur est censé lui appartenir exclusivement pour cette raison ;
- Le mur présente d’un seul côté un chaperon, ou des filets ou corbeaux de pierre : il appartient exclusivement au propriétaire du côté duquel se trouvent ces marques extérieures de construction.
Le « chaperon » est le toit du mur ou un avancement de celui-ci. Un « filet » - parfois appelé « larmier » - représente la partie du chaperon qui déborde du mur pour empêcher les eaux pluviales de couler le long du mur. Si un chaperon ou un filet n’existe que d’un seul côté, c’est dans cette direction que s’écoulent les eaux pluviales.
Cas pratique
A l’inverse, une cour d’appel a estimé qu’un chaperon arrondi des deux côtés faisait présumer la mitoyenneté dès lors qu’il n’y a ni titre ni acte contraires (CA Lyon, 27.1.1993, D. 93, som., p. 304)
Les « corbeaux » sont des pierres en saillie destinées à appuyer une future construction (on pourra plus tard y adosser des poutres). Si des corbeaux n’existent que d’un seul côté, le mur est présumé appartenir exclusivement au voisin du côté duquel ils se trouvent.
Cas pratique
Le mur qui sépare mon jardin de celui de mon voisin a un toit avec une pente de chaque côté des terrains. Mon voisin me soutient que ce mur lui appartient. J’ai appris récemment que la pente d’un toit d’un mur de séparation sert à prouver le caractère privatif du mur quand la pente n’est que d’un côté du mur. Que se passe-t-il quand la pente est de chaque côté du mur ? Devient-il mitoyen de ce fait ?
Dans votre cas, le mur est présumé mitoyen s’il sert de séparation entre deux jardins (art. 653, C. civ.). Il faut cependant que ce mur remplisse d’autres conditions : il doit s’agir notamment d’un mur en dur et non d’une simple palissade, par exemple. Il ne doit pas être construit en retrait de la ligne séparative sur le terrain de votre voisin…
L’article 654 du Code civil ne cite les marques de non-mitoyenneté (comme la pente du toit) que lorsqu’elles ne figurent que d’un seul côté du mur. On ne peut donc pas en déduire que celles-ci jouent le rôle d’une présomption de mitoyenneté lorsqu’elles existent des deux côtés. Pourtant certains arrêts ont sauté le pas […].
Autres preuves
Il s’agit là d’une énumération indicative et non limitative ; d’autres marques ou preuves peuvent être rapportées pour étbalir le caractère privatif du mur (usage des lieux, date de sa construction…).
Cas pratiques
- Deux couples sont propriétaires d’immeubles contigus. L’un d’entre eux surélève le mur de séparation estimant qu’il est mitoyen. Le couple voisin s’insurge contre ce procédé et saisit les tribunaux. Pour la cour d’appel, la construction nouvelle n’a pas été pratiquée sur un mur mitoyen en l’absence de preuve de la mitoyenneté par titre ou présomption légale de l’article 653 du Code civil ou par prescription acquisitive […].
Cet arrêt est cassé : pour la Cour de cassation, la cour d’appel aurait dû rechercher si les présomptions simples qui étaient invoquées par le couple de constructeurs n’établissait pas le caractère mitoyen du mur (C. cass., civ. 3e, 19.4.1989, BC n°87, D. 90, som., p. 304. […]).
- Dans une autre affaire, il a été retenu que le mur, par sa technique de construction, n’avait pu être construit à l’origine que pour séparer deux propriétés par une clôture mitoyenne. En outre, il a été jugé qu’un « chaperon arrondi fait présumer la mitoyenneté dès lors qu’il n’existe aucun titre ni aucun acte contraire » (CA Lyon, 6e civ., 27.1.1993, D. 93, som., p. 304. […])
La hiérarchie des modes de preuve
[…] La loi prévoit que la présomption de mitoyenneté s’efface devant les « marques du contraire », présumant la non-mitoyenneté et ce sous réserve de la libre appréciation des juges (art. 653, C. civ.). »
En complément, quelques décisions rendues à Lyon :
- Cour d'appel de Lyon, 22 septembre 2015, n° 13/09447
- Cour d'appel de Lyon, 6 septembre 2016, n° 15/01141
Nous vous laissons également consulter les articles 653 à 673 du Code civil sur la mitoyenneté.
N’hésitez pas à contacter votre Adil pour des renseignements plus précis en fonction de votre situation personnelle.
Bonne journée.
Si nous comprenons bien, vous cherchez à prouver le caractère privatif d’un mur séparant deux propriétés. Nous vous laissons dans un premier temps consulter cette page de la préfecture du Rhône : Mur mitoyen. Nous y lisons notamment les précisions suivantes :
«
Un mur mitoyen est un mur qui sépare :
• 2 bâtiments appartenant à 2 propriétaires distincts,
• ou entre cours et jardins appartenant à 2 propriétaires distincts,
• ou entre enclos dans les champs appartenant à 2 propriétaires distincts.
À NOTER
un mur peut être mitoyen en totalité, ou seulement sur une partie.
Toutefois, le mur n'est pas mitoyen s'il existe :
• une pente unique à son sommet,
• ou des tuiles ou corniches d'un seul côté.
Dans ces 2 cas, le mur est réputé appartenir exclusivement au propriétaire du côté duquel se trouve la pente, les tuiles ou les corniches.
La preuve de la non mitoyenneté peut également être apportée :
• par un titre de propriété,
• ou par prescription (si un seul des voisins entretient ou répare le mur pendant 30 ans, voire 10 ans si elle acquiert le bien de bonne foi et détient un juste titre). »
Voici en outre les informations que nous trouvons dans l’ouvrage Servitudes et mitoyenneté : le guide pratique :
«
Certaines marques de construction peuvent aller dans le sens du caractère privatif du mur, et donc contrer la présomption de mitoyenneté. Il s’agit de détails dans la construction du mur qui donnent à penser, en l’absence d’autres éléments plus probants comme un titre de propriété ou une prescription, que le mur appartient à un seul des deux voisins. Est ainsi considéré comme non-mitoyen le mur sur lequel existe un certain nombre de signes extérieurs visibles établissant que le mur est privatif.
L’article 654 du Code civil énonce des marques de non-mitoyenneté :
- Le sommet du mur n’a qu’une pente : il appartient alors au propriétaire vers le terrain duquel la pente est inclinée. Cette règle est liée à celle concernant l’écoulement des eaux de pluie. Le propriétaire d’un mur privatif doit obligatoirement faire tomber les eaux sur son terrain. Le mur est censé lui appartenir exclusivement pour cette raison ;
- Le mur présente d’un seul côté un chaperon, ou des filets ou corbeaux de pierre : il appartient exclusivement au propriétaire du côté duquel se trouvent ces marques extérieures de construction.
Le « chaperon » est le toit du mur ou un avancement de celui-ci. Un « filet » - parfois appelé « larmier » - représente la partie du chaperon qui déborde du mur pour empêcher les eaux pluviales de couler le long du mur. Si un chaperon ou un filet n’existe que d’un seul côté, c’est dans cette direction que s’écoulent les eaux pluviales.
Cas pratique
A l’inverse, une cour d’appel a estimé qu’un chaperon arrondi des deux côtés faisait présumer la mitoyenneté dès lors qu’il n’y a ni titre ni acte contraires (CA Lyon, 27.1.1993, D. 93, som., p. 304)
Les « corbeaux » sont des pierres en saillie destinées à appuyer une future construction (on pourra plus tard y adosser des poutres). Si des corbeaux n’existent que d’un seul côté, le mur est présumé appartenir exclusivement au voisin du côté duquel ils se trouvent.
Cas pratique
Le mur qui sépare mon jardin de celui de mon voisin a un toit avec une pente de chaque côté des terrains. Mon voisin me soutient que ce mur lui appartient. J’ai appris récemment que la pente d’un toit d’un mur de séparation sert à prouver le caractère privatif du mur quand la pente n’est que d’un côté du mur. Que se passe-t-il quand la pente est de chaque côté du mur ? Devient-il mitoyen de ce fait ?
Dans votre cas, le mur est présumé mitoyen s’il sert de séparation entre deux jardins (art. 653, C. civ.). Il faut cependant que ce mur remplisse d’autres conditions : il doit s’agir notamment d’un mur en dur et non d’une simple palissade, par exemple. Il ne doit pas être construit en retrait de la ligne séparative sur le terrain de votre voisin…
L’article 654 du Code civil ne cite les marques de non-mitoyenneté (comme la pente du toit) que lorsqu’elles ne figurent que d’un seul côté du mur. On ne peut donc pas en déduire que celles-ci jouent le rôle d’une présomption de mitoyenneté lorsqu’elles existent des deux côtés. Pourtant certains arrêts ont sauté le pas […].
Autres preuves
Il s’agit là d’une énumération indicative et non limitative ; d’autres marques ou preuves peuvent être rapportées pour étbalir le caractère privatif du mur (usage des lieux, date de sa construction…).
Cas pratiques
- Deux couples sont propriétaires d’immeubles contigus. L’un d’entre eux surélève le mur de séparation estimant qu’il est mitoyen. Le couple voisin s’insurge contre ce procédé et saisit les tribunaux. Pour la cour d’appel, la construction nouvelle n’a pas été pratiquée sur un mur mitoyen en l’absence de preuve de la mitoyenneté par titre ou présomption légale de l’article 653 du Code civil ou par prescription acquisitive […].
Cet arrêt est cassé : pour la Cour de cassation, la cour d’appel aurait dû rechercher si les présomptions simples qui étaient invoquées par le couple de constructeurs n’établissait pas le caractère mitoyen du mur (C. cass., civ. 3e, 19.4.1989, BC n°87, D. 90, som., p. 304. […]).
- Dans une autre affaire, il a été retenu que le mur, par sa technique de construction, n’avait pu être construit à l’origine que pour séparer deux propriétés par une clôture mitoyenne. En outre, il a été jugé qu’un « chaperon arrondi fait présumer la mitoyenneté dès lors qu’il n’existe aucun titre ni aucun acte contraire » (CA Lyon, 6e civ., 27.1.1993, D. 93, som., p. 304. […])
La hiérarchie des modes de preuve
[…] La loi prévoit que la présomption de mitoyenneté s’efface devant les « marques du contraire », présumant la non-mitoyenneté et ce sous réserve de la libre appréciation des juges (art. 653, C. civ.). »
En complément, quelques décisions rendues à Lyon :
- Cour d'appel de Lyon, 22 septembre 2015, n° 13/09447
- Cour d'appel de Lyon, 6 septembre 2016, n° 15/01141
Nous vous laissons également consulter les articles 653 à 673 du Code civil sur la mitoyenneté.
N’hésitez pas à contacter votre Adil pour des renseignements plus précis en fonction de votre situation personnelle.
Bonne journée.
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