Question d'origine :
Qu'est devenu Mohilof, chien du Duc d'Enghien, après l' exécution de son maître au château de Vincennes le 21 mars 1804 ?
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 03/03/2020 à 14h20
Bonjour,
L’histoire et la célébrité de ce carlin sont liées à l’arrestation et l’exécution sommaire de Louis-Antoine de Bourbon-Condé, duc d’Enghien, sur ordre de Napoléon Bonaparte. Voici le résumé qu’en donne La Nouvelle république :
« Prétextant un complot, le Premier consul fait arrêter, dans la nuit du 15 mars dans le Bade, non loin du Rhin, l'un des derniers princes de sang royal : le jeune Louis Antoine de Bourbon Condé, duc d'Enghien. N'écoutant que son sentiment de fidélité, le carlin que l'épouse du duc, Charlotte de Rohan, lui avait offert en Pologne quelques années plus tôt, lui emboîte le pas. Les soldats le repoussent à coup de bottes, mais le carlin les poursuit à travers l'Europe. En arrivant sur le Rhin, il se jette dans l'eau glacée et traverse le fleuve à la nage. Il réussit à sauter dans la voiture de son maître un peu après Strasbourg et se blottit contre le duc. Impressionnés par la force de cet animal, les gardes le laissent monter… et filent à tombeau ouvert vers Paris. Le duc d'Enghien est conduit le 20 mars dans l'après-midi au château de Vincennes. Le soir, il donne son repas à son carlin, qui l'a suivi jusque dans le cachot. Réveillé à deux heures du matin, le duc d'Enghien subit un simulacre de procès puis est froidement conduit dans les fossés du château, face à un peloton d'exécution. Mohiloff veut s'interposer, mais le duc l'éloigne. Une salve retentit. Enghien est mort. « Plus qu'un crime dira Fouché ou Talleyrand ? C'est une faute». Enghien est enterré dans une fosse creusée la veille. Le carlin reste plusieurs jours à hurler la mort de son maître. Le peintre Carle Vernet l'immortalise grattant la pierre qui recouvre la tombe. Après sa mort, Mohiloff est naturalisé et exposé à Strasbourg au Musée du Palais de Rohan. »
Contrairement à une légende tenace, le chien a donc survécu à son maître, et fut recueilli. L’ouvrage La Princesse Charlotte de Rohan et le Duc d'Enghien: un roman d'exil ; de Jacques de la Faye, conservé à la BnF et consultable sur Google Livres, nous apprend par qui :
« Mohiloff ne resta pas à Vincennes. Le marquis de Béthisy étant venu furtivement voir l’endroit où le duc d’Enghien avait été fusillé, trouva la pauvre bête couchée, à demi morte, sur la fosse qui recouvrait les restes de son maître. Elle se laissa emmener par lui, et il la garda […]. »
La suite du texte nous dit que c’est chez le marquis de Béthisy que Mohiloff restera jusqu’à sa mort, et suggère que c’est celui-ci qui l’a fait empaillé. A sa mort, sa veuve aurait offert la dépouille du carlin au collectionneur Eudoxe Marcille.
D’après le numéro de la Gazette anecdotique, littéraire, artistique et bibliographique datée du 15 janvier 1989, lisible sur Gallica, c’est d’ailleurs dudit collectionneur que l’on tiendrait l’anecdote.
Mais pourquoi le marquis de Béthisy a-t-il furtivement emporté le chien ? Dans Par le sang d'un prince [Livre] : le duc d'Enghien, Paul Lombard affirme qu’en agissant ainsi, ce général royaliste agit à l’encontre d’une interdiction absolue transmise au gouverneur du château de Vincennes, M. Harel, de confier le chien à qui le demanderait, dans le seul but d’humilier la veuve du duc d’Enghien, Charlotte de Rohan, en lui refusant ce souvenir. Le futur empereur n’était pas tendre avec les ci-devant, est-on tenté de se dire – même si le ton employé par l’auteur laisse peu de doute sur sa partialité.
Avant de quitter ce bon Mohiloff, signalons, sur Gallica, un numéro du Bulletin de la Société des amis de Vincennes daté de 1933, présente une photo du chien empaillé.
Bonne journée.
L’histoire et la célébrité de ce carlin sont liées à l’arrestation et l’exécution sommaire de Louis-Antoine de Bourbon-Condé, duc d’Enghien, sur ordre de Napoléon Bonaparte. Voici le résumé qu’en donne La Nouvelle république :
« Prétextant un complot, le Premier consul fait arrêter, dans la nuit du 15 mars dans le Bade, non loin du Rhin, l'un des derniers princes de sang royal : le jeune Louis Antoine de Bourbon Condé, duc d'Enghien. N'écoutant que son sentiment de fidélité, le carlin que l'épouse du duc, Charlotte de Rohan, lui avait offert en Pologne quelques années plus tôt, lui emboîte le pas. Les soldats le repoussent à coup de bottes, mais le carlin les poursuit à travers l'Europe. En arrivant sur le Rhin, il se jette dans l'eau glacée et traverse le fleuve à la nage. Il réussit à sauter dans la voiture de son maître un peu après Strasbourg et se blottit contre le duc. Impressionnés par la force de cet animal, les gardes le laissent monter… et filent à tombeau ouvert vers Paris. Le duc d'Enghien est conduit le 20 mars dans l'après-midi au château de Vincennes. Le soir, il donne son repas à son carlin, qui l'a suivi jusque dans le cachot. Réveillé à deux heures du matin, le duc d'Enghien subit un simulacre de procès puis est froidement conduit dans les fossés du château, face à un peloton d'exécution. Mohiloff veut s'interposer, mais le duc l'éloigne. Une salve retentit. Enghien est mort. « Plus qu'un crime dira Fouché ou Talleyrand ? C'est une faute». Enghien est enterré dans une fosse creusée la veille. Le carlin reste plusieurs jours à hurler la mort de son maître. Le peintre Carle Vernet l'immortalise grattant la pierre qui recouvre la tombe. Après sa mort, Mohiloff est naturalisé et exposé à Strasbourg au Musée du Palais de Rohan. »
Contrairement à une légende tenace, le chien a donc survécu à son maître, et fut recueilli. L’ouvrage La Princesse Charlotte de Rohan et le Duc d'Enghien: un roman d'exil ; de Jacques de la Faye, conservé à la BnF et consultable sur Google Livres, nous apprend par qui :
« Mohiloff ne resta pas à Vincennes. Le marquis de Béthisy étant venu furtivement voir l’endroit où le duc d’Enghien avait été fusillé, trouva la pauvre bête couchée, à demi morte, sur la fosse qui recouvrait les restes de son maître. Elle se laissa emmener par lui, et il la garda […]. »
La suite du texte nous dit que c’est chez le marquis de Béthisy que Mohiloff restera jusqu’à sa mort, et suggère que c’est celui-ci qui l’a fait empaillé. A sa mort, sa veuve aurait offert la dépouille du carlin au collectionneur Eudoxe Marcille.
D’après le numéro de la Gazette anecdotique, littéraire, artistique et bibliographique datée du 15 janvier 1989, lisible sur Gallica, c’est d’ailleurs dudit collectionneur que l’on tiendrait l’anecdote.
Mais pourquoi le marquis de Béthisy a-t-il furtivement emporté le chien ? Dans Par le sang d'un prince [Livre] : le duc d'Enghien, Paul Lombard affirme qu’en agissant ainsi, ce général royaliste agit à l’encontre d’une interdiction absolue transmise au gouverneur du château de Vincennes, M. Harel, de confier le chien à qui le demanderait, dans le seul but d’humilier la veuve du duc d’Enghien, Charlotte de Rohan, en lui refusant ce souvenir. Le futur empereur n’était pas tendre avec les ci-devant, est-on tenté de se dire – même si le ton employé par l’auteur laisse peu de doute sur sa partialité.
Avant de quitter ce bon Mohiloff, signalons, sur Gallica, un numéro du Bulletin de la Société des amis de Vincennes daté de 1933, présente une photo du chien empaillé.
Bonne journée.
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