Question d'origine :
Pourquoi les grandes découvertes bouleversent-elles les habitudes alimentaires ?
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 16/01/2018 à 10h23
Bonjour,
Les grandes découvertes désignent un vaste mouvement de reconnaissance entrepris par les Européens aux XVe et XVIe s. Cependant, les hommes n'ont pas commencé à découvrir le monde depuis seulement cette époque. Dès la préhistoire, ils ont exploré et peuplé tous les continents, se sont séparés pour se découvrir à nouveau.
[...]
Les nouveaux produits
C'est à Cuba que Colomb voit pour la première fois des hommes et des femmes « allumer des herbes dont ils aspirent la fumée ». Très vite, l'Espagne se met à la culture dutabac . Son usage se répand en petite quantité dans toute l'Europe. Il est vulgarisé par Jean Nicot, ambassadeur de France à Lisbonne vers 1560. Au cours du même voyage, Colomb découvre le maïs , qui est rapidement adopté en Europe, où il contribue, par sa valeur nutritive, à la poussée démographique. En revanche, l'Europe est longtemps réticente à utiliser la pomme de terre , originaire des Andes et introduite en 1534. Les Espagnols découvrent le cacao et l'adoptent avec enthousiasme. La dégustation de la tasse de chocolat se répand un peu partout en Europe, du moins dans les classes aisées. L'usage du sucre de canne se généralise grâce aux moulins à sucre du Nouveau Monde.
Inversement, des produits originaires d'Afrique ou d'Asie sont implantés par les Européens en Amérique. D'Éthiopie, lecafé gagne, aux XIV-XVe siècles, le Yémen et l'Arabie. Les Hollandais l'implantent dans leurs colonies, d'où il atteint le Nouveau Monde (le Brésil à la fin du XVIIIe siècle). Le thé , originaire de Chine, se répand au XIXe siècle à Java et à Ceylan. On connaît le succès du thé de Ceylan en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas.
source : Larousse
Vous dîtes que ces grandes découvertes bouleversent les habitudes alimentaires. Le verbe "bouleverser" est à relativiser car les transformations des habitudes alimentaires se font plutôt lentement et touchent de manière inégale les différentes strates de la société :
" Les grands découvertes donnèrent un élan décisif à la curiosité alimentaire du Vieux Monde. D'Amérique, on ramena le maïs, la pomme de terre, la tomate... ; de l'Orient lointain nous vient le riz, l'aubergine ; du nord-est de l'Europe, le sarrasin... Au siècle des Lumières débarquèrent dans les ports européens le sucre, le cacao, le thé.Les amateurs de ces nouveautés resteront longtemps très minoritaires. Il fallait être sensible aux modes, citadin et privilégié pour succomber à la tentation. De surcroît, la suspicion a longtemps pesé sur ces nourritures des nouveaux mondes au point qu'elles ont subi un long purgatoire avant de se généraliser. "
source : Au banquet de la nature : alimentation, agriculture et politiques / Joseph Garnotel
Votre question reste entière : pourquoi avons-nous soif de découvrir de nouvelles saveurs ?
Massimo Montanari et Jean-Robert Pitte avancent une théorie :
" Valeurs, attachements identitaires, plaisirs: l'alimentation est un moyen d'échange privilégié entre les sociétés. Découvrir les richesses gastronomiques de leurs voisins décourage les instincts belliqueux des peuples, leurs inclinations à la guerre, aux frontières et encourage plutôt leur curiosité, souvent leur gourmandise, parfois leur verve. Que l'on songe seulement à l'admiration goulue des Français pour la pizza, la pasta, la paella ou la saucisse de Francfort et leur dédain ironique pour la sauce à la menthe, le gigot bien cuit, les légumes à l'eau ou la crème aigre-douce. Les frontières qu'examine ce livre sont géographiques.Elles n'en présentent pas moins la condition humaine dans son unité et dans toute sa diversité. Seuls les plantes et les animaux se nourrissent de leur environnement immédiat. Depuis toujours, les sociétés humaines font appel à l'ailleurs . Leurs besoins ont été à la source des grandes routes commerciales, des caravanes de sel et flottilles de vin, d'épices ou de sucre aux avions-cargos de poissons frais pêchés dans toutes les mers du globe, en passant par les camions et trains de fruits et de légumes."
Le développement du commerce, des moyens de transport, des techniques et de la finance, ainsi que des évolutions socio-culturelles ont concouru à l'adoption de nouvelles habitudes alimentaires voire à une uniformisation des goûts et des modes de vie.
D'après Jean-Robert Pitte, "Nous mangeons tous comme nous pouvons, en fonction de nos moyens, mais aussi selon nos rêves, selon les représentations que nous nous faisons de l'alimentation . C'est pourquoi l'alimentation change dans le temps, en relation avec les techniques et les modes, mais aussi dans l'espace, ce qui intéresse alors le géographe. Aujourd'hui, les apparences sont à l'uniformisation de l'alimentation , comme de nombreuses expressions de la culture, ... "
" Au risque de décevoir il est préférable de répéter qu'aucune cuisine jamais été stable que les produits de base et les techniques ont toujours évolué que les influences extérieures ont toujours été nombreuses en tous points de la planète et toutes les époques . Cependant le rythme d'évolution s'est sans doute accéléré depuis les grandes découvertes il y a cinq siècles
2.7 accélération du changement
Les Temps Modernes ont été propices aux échanges de matières premières alimentaires nombreuses.Maîtrisant la plupart des circuits commerciaux c'est l'Europe qui a le plus bénéficié de ces apports extérieurs. Elle a adopté la tomate, le poivron, le maïs, avec enthousiasme, la pomme de terre avec un peu plus de réticence. Le sucre, le café, le thé, le cacao, de par leur prix ont abord été réservés à l'élite avant être accessibles à toute la pyramide sociale au moment de la révolution industrielle et du maximum des conquêtes coloniales " [...]
" Cependant comme on l'a dit chaque pays, chaque région même, conserva son particularisme culinaire au moins jusqu' à la Seconde Guerre mondiale. Même si on pouvait manger exotique dans beaucoup de grandes villes de la planète depuis longtemps il s'agissait encore d'exceptions et, pour les gourmets, d'expériences rares qu'il ne convenait pas de renouveler trop souvent. Le goût du nouveau était en quelque sorte contenu (A. Capatti 1989). Le brassage semble s'accélérer dans la première moitié du XXe siècle. La Première Guerre Mondiale n'y est pas étrangère. Elle permet la rencontre d'hommes venus de toute Europe des Empires coloniaux qui étendent sur tous les continents et toutes les mers et de l'Amérique du Nord ".
A lire aussi :
- Histoire de la mondialisation / Régis Bénichi
- Les frontières alimentaires / sous la direction de Massimo Montanari et Jean-Robert Pitte
- Géohistoire de la mondialisation : le temps long du monde / Christian Grataloup
- La mondialisation à table / Jean Vitaux dont quelques chapitres sont consultables sur cairn.
Source : numelyo
Bonne journée.
[...]
Les nouveaux produits
C'est à Cuba que Colomb voit pour la première fois des hommes et des femmes « allumer des herbes dont ils aspirent la fumée ». Très vite, l'Espagne se met à la culture du
Inversement, des produits originaires d'Afrique ou d'Asie sont implantés par les Européens en Amérique. D'Éthiopie, le
source : Larousse
Vous dîtes que ces grandes découvertes bouleversent les habitudes alimentaires. Le verbe "bouleverser" est à relativiser car les transformations des habitudes alimentaires se font plutôt lentement et touchent de manière inégale les différentes strates de la société :
" Les grands découvertes donnèrent un élan décisif à la curiosité alimentaire du Vieux Monde. D'Amérique, on ramena le maïs, la pomme de terre, la tomate... ; de l'Orient lointain nous vient le riz, l'aubergine ; du nord-est de l'Europe, le sarrasin... Au siècle des Lumières débarquèrent dans les ports européens le sucre, le cacao, le thé.
source : Au banquet de la nature : alimentation, agriculture et politiques / Joseph Garnotel
Votre question reste entière : pourquoi avons-nous soif de découvrir de nouvelles saveurs ?
Massimo Montanari et Jean-Robert Pitte avancent une théorie :
" Valeurs, attachements identitaires, plaisirs: l'alimentation est un moyen d'échange privilégié entre les sociétés. Découvrir les richesses gastronomiques de leurs voisins décourage les instincts belliqueux des peuples, leurs inclinations à la guerre, aux frontières et encourage plutôt leur curiosité, souvent leur gourmandise, parfois leur verve. Que l'on songe seulement à l'admiration goulue des Français pour la pizza, la pasta, la paella ou la saucisse de Francfort et leur dédain ironique pour la sauce à la menthe, le gigot bien cuit, les légumes à l'eau ou la crème aigre-douce. Les frontières qu'examine ce livre sont géographiques.
D'après Jean-Robert Pitte, "
" Au risque de décevoir il est préférable de répéter qu'aucune cuisine jamais été stable que
Les Temps Modernes ont été propices aux échanges de matières premières alimentaires nombreuses.
A lire aussi :
- Histoire de la mondialisation / Régis Bénichi
- Les frontières alimentaires / sous la direction de Massimo Montanari et Jean-Robert Pitte
- Géohistoire de la mondialisation : le temps long du monde / Christian Grataloup
- La mondialisation à table / Jean Vitaux dont quelques chapitres sont consultables sur cairn.
Source : numelyo
Bonne journée.
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