Question d'origine :
A-t-on une indication sur le nombre moyen de livres d'une même édition imprimés à Lyon à l'époque de la Renaissance ? Peut-on avoir une idée de ce nombre pour la première édition de la Délie de Maurice Scève en 1544, et pour les Œuvres de Louise Labé en 1555. Merci de votre réponse.
Réponse du Guichet
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Il sera difficile d’obtenir des chiffres propres à l’imprimerie lyonnaise mais il n’y a aucune raison de supposer qu’ils soient différents de ceux relatifs aux autres grands centres de production du livre.
Laissons Marie-Anne Merland, conservatrice des bibliothèques, historienne du livre, bibliographe et auteur de l’article tirage dans le Dictionnaire encyclopédique du livre (t. 3, p. 844), nous dire la difficulté de répondre de manière précise à cette question : « Peu de documents existent sur les chiffres de tirage pratiqués par les imprimeurs de la période artisanale. Ce n’est souvent qu’incidemment qu’il y est fait allusion et c’est par approximation que l’on avance des chiffres. […]
Pendant la période des incunables [soit de l’invention de l’imprimerie dans les années 1450 jusqu’au 31 décembre 1500, dates définies par convention et servant à distinguer les premiers livres imprimés], on estime que les tirages moyens se situent entre 150 et 200 exemplaires, atteignant les 1500 dans les années 1490 chez certains grands éditeurs. A partir du XVIe siècle et jusqu’à la fin du XVIIIe, les chiffres varient, sauf exception, de 500 à 2 000. »
L'historien du livre Henri-Jean Martin aborde également la question dans son ouvrage fondateur L’apparition du livre, écrit avec Lucien Febvre et publié en 1958. Une étude de plusieurs cas particuliers permet « de penser que la moyenne des tirages oscille, au début du XVIe siècle, entre 1 000 et 1 500 exemplaires avec, parfois encore, des chiffres plus réduits. […] A partir de cette époque, donc, le chiffre des tirages semble se stabiliser. »
Malgré nos recherches sur la Délie de Maurice Scève et l'édition des oeuvres de Louise Labé chez Jean de Tournes, nous n'avons pu déterminer le nombre d'exemplaires tirés pour ces monuments de l'imprimerie lyonnaise. La très nombreuse bibliographie relative explore bien davantage les aspects littéraire et iconographiques de ces oeuvres plutôt que leur dimension matérielle.
S'agissant de textes littéraires d'auteurs contemporains, il n'y a pas de raison de croire qu'ils aient fait l'objet de tirages plus importants que la moyenne, le libraire-éditeur ayant toujours le souci commercial de veiller à la capacité d'absorption de son produit par le marché, sans générer un stock immobilisant trop longtemps son capital et encombrant ses locaux.
Il n'est au contraire pas invraisemblable que ces tirages aient été volontairement réduits afin de minimiser la prise de risque.
C’est un argument que semble corroborer Albert Champdor qui rappelle dans son Louise Labé, son œuvre et son temps que le succès de la première édition de 1555 fut tel que Jean de Tournes en publia une seconde l’année suivante. Si le tirage en était déjà épuisé au bout de quelques mois, il est fort probable que les exemplaires de cette première édition aient été numériquement peu nombreux, en-deçà des tirages moyens de l'époque.
Tchemerzine qualifie cette édition originale de 1555 de « rarissime » (Avenir Tchemerzine, Bibliographie d’éditions originales et rares d’auteurs français…, Paris, 1932, t. VI, p. 296). Quant à l’édition la Délie de Scève, elle est dite « d’une grande rareté » par le même auteur (op. cit., t. X, p. 246).
La rareté du nombre d’exemplaires qui nous soient parvenus constitue ainsi un dernier indice témoignant sans doute de la faible quantité des tirages initiaux.
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