Art : multiple et reproduction

Réponse du Département Arts et Loisirs

Comme le dit Erika Lederman « il est sans doute plus facile de décrire le multiple par ce qu’il n’est pas ».
Les définitions sont plurielles:
Ainsi le Lexicon der Kunst désigne une tendance ou un phénomène apparus pour la première fois dans les années 1960, élaborés à partir d’objets et qui ont conduit à une reproduction d’objets en série, un parti pris qui contribua au rayonnement de l’objet d’art pendant deux décennies et la nôtre durant lesquelles de petits tirages (édition comprise) ont été produits. Des propriétaires de galeries d’art s’y sont engagés, par exemple la galeriste Block à Berlin. Cette pratique a été réactualisée très récemment.
La définition dite « puriste » des multiples est rappelée par Hilary Lane dans le catalogue « Art Unlimited » en 1994 : « bon marché, simples et facilement disponibles en quantités illimitée. »

Ces définitions n’étant pas exclusives, vous mesurez dès lors la difficulté !
Les éléments auxquels vous faites allusion: la justification, la numérotation des tirages sont des points essentiels pour l’authentification de l’œuvre. Il existe également des aspects techniques visibles à l'oeil nu ou avec l'aide d'un compte-fils. Cette observation physique de l'oeuvre est propre à chaque type de multiples: la cuvette d'une gravure par exemple qui en assure l'authenticité.

Le multiple étant par essence la même œuvre reproduite en nombre avec une limite de tirage décidée par l’artiste celui-ci ne semble pas soumis à une règle particulière exceptée celle mathématique du « au moins deux ». L'artiste peut décidé d'un retirage ou d'une destruction de la matrice, des négatifs...


Oceane Delleaux note une idéologie du multiple vecteur de démocratisation du moins au départ avec une acception plus large du terme ensuite.
Dans son ouvrage Le multiple d'artiste, elle explore les variables historiques de cette terminologie et apporte tous les éléments nécessaires à ce qui semble "une impossible définition unique et parfaitement circonscrite du Multiple".

Enfin la question de la reproduction appelle une réponse plus complexe : qu’est-ce qui fait art, acte d’art ? Dali n'a t-il pas signé « des pages blanches » exploitées par d'autres ? Comment les considérer ?

Michel Melot in L’estampe un art multiple à la portée de tous ? évoque l’affaire des fausses copies d’originaux fantômes racontée par Hans J.Van Miegroet, particulièrement révélatrice de la nature de l’image capable non seulement de reproduire ses modèles mais aussi de produire des modèles imaginaires et de faire croire à leur existence. La copie alors, loin d’être subordonnée à un modèle, fait croire à l’existence d’un original imaginaire.
Il poursuit par un certain nombre de questions :
les estampes procèdent–elles d’un modèle dont elles ne sont que la forme passive ou produisent-elles leur modèle ?
Le processus de reproduction est–il créateur ?
Dans quelle mesure la reproduction participe t-elle à la création de l’originale ?

La lecture de ces deux documents devrait, en partie, répondre à vos questions.