dissoudre vernis sur un tableau

Réponse du Département Arts et Loisirs

Au préalable, il ne nous appartient ni de diagnostiquer ni de traiter "les maux" des objets…Cette réponse offre des éléments mais en aucun cas ne préconise une quelconque recette chimique car c’est bien de cela qu’il s’agit. Nous ne sommes pas dans le registre du « Parfait petit chimiste » aux vues de la dangerosité des produits et mélanges évoqués.

Un vernis connait trois phases de développement et le jaunissement sonne le glas de sa vie.

Pour bien comprendre cette altération :

« Cette phase est celle du processus d’oxydation et d’autres réactions renforcées par des agents climatiques et l’action de la lumière. C’est au cours de cette phase que des processus chimiques se déroulant au sein de la couche de vernis provoquent son jaunissement, son durcissement et sa fragilisation.
Le passage d’une phase à l’autre n’est pas clairement perceptible. On estime que le processus d’altération peut durer de 50 à 100 ans selon l’état de conservation de l’œuvre.
On parle de jaunissement lorsqu’un vernis clair et transparent perd peu à peu son aspect originel et jaunit, voire brunit. Tous les vernis employés en peinture ou en restauration jaunissent plus ou moins fortement. L’ampleur de cette altération dépend de la composition du vernis. Le processus de jaunissement d’un vernis est comparable à celui d’une huile. Les résines naturelles sont aussi des liaisons insaturées qui forment des produits d’oxydation jaunes en absorbant l’oxygène de l’air.(-) Des deux vernis aux résines naturelles employés généralement en restauration (le vernis Dammar et le vernis Mastic), le vernis Mastic est celui qui jaunit le plus vite.(-) Les vernis synthétiques utilisés couramment en restauration, par exemple les vernis aux polycyclohexanones, jaunissent et s’assombrissent également, moins fortement toutefois que les vernis aux résines naturelles. »

Manuel de restauration des tableaux de Knut Nicolaus, un incontournable pour l’analyse et les solution apportées à la restauration des œuvres peintes.

Dans votre cas il est question d’une opération dite « d’allégement ou de dévernissage ».

Selon le type d’encrassement, de vernis il y a plusieurs modes de nettoyage : à sec avec des produits purs mélangés, avec des solvants purs ou mélangés, des gelées d’enzymes, le savon résinique, des lessives, des acides, au scalpel et/ou micro-sablage.
Les gelées d’enzymes, le savon résinique, les gels ou les émulsions de solvants sont d’emploi récent.

On utilise des solvants pour dissoudre et enlever le vernis. Il faut cependant trouver la bonne alliance chimique, celle qui vise l’interaction entre les molécules du solvant et celle de la substance à dissoudre cf. le diagramme de solubilité ou triangle de Teas (voir page 112 de l’ouvrage Restaurer les tableaux, la technique et l’art de la restauration des peintures sur toile).

Pour l’enlèvement des vernis voici la liste des solvants possibles : white spirit, toluène, xylène, térébenthine, tétrachlorure de carbone, trichloréthylène, éthanol ou alcool éthylique, acétone, cyclohexanone, acétate d’éthyle, éthylglycol, diméthylformamide, ammoniac, acide formique.
Deux recettes furent souvent employées :
-L’éther isopropylique (éthylglycol) mélangé avec de l’éthanol ou de l’acétone.
-Le diméthylformmide et les acides pour l’enlèvement de vernis très résistants.

Petites précautions :

Le white spirit que vous avez déjà utilisé l’est comme diluant dans l’enlèvement des vernis. Sa conservation est sensible. Si la bouteille est mal fermée, les hydrocarbures aromatiques sont les premiers à s’échapper. La perte de solvant aromatique modifie les propriétés du produit et altère son principe.
Concernant la térébenthine, seule la térébenthine rectifiée ou bi-rectifiée présente les critères de pureté indispensable à cet usage.
Au cours de l’élimination du vernis il faut examiner régulièrement la couche de vernis en éclairant avec une lampe UV (fluorescence).
Marion Dumaine in la restauration de tableaux dans la collection « Recettes d’atelier » propose une version "soft" d’allègement de vernis à l’isopropanol et dresse succinctement la liste de matériel nécessaire ainsi que les différentes étapes (page 117).

Grandes précautions :

Nous vous alertons donc sur des mélanges qui pourraient être néfastes pour votre tableau mais bien plus grave, pour votre santé.
Pour éviter tous risques, nous vous conseillons donc vivement de consulter un ou une restauratrice d’art qui maitrise parfaitement cette alchimie.
De plus, il ou elle veillera à l’intégrité de l’œuvre, à la sauvegarde de la peinture, des patines et glacis… car cette intervention délicate reste irréversible.