Peut-on diffuser un jeu de carte dont les images ne sont pas libres de droit ?
Question d'origine :
Bonjour,
Au sein de la médiathèque où je travaille, nous avons réalisé un jeu de 7 familles avec des adolescents autour de l'unviers des mangas. Chaque carte comporte un visuel d'un personnage manga. Nous n'avons pas pu récupérer des visuels libres de droit du fait de nos contraintes graphiques. Pouvons-nous utiliser ce jeu de cartes sur le site de la bibliothèque à des fins ludiques et pédagogiques ? Est-il possible de diffuser le fichier numérique de ce jeu au sein des établissements scolaires partenaires à condition qu'il ne soit pas diffusé ?
Je vous remercie !
Réponse du Guichet
Les mangas et leurs personnages sont des œuvres de l'esprit. A ce titre ils sont protégés par le Code de la propriété intellectuelle et leur utilisation n'échappe pas aux règles qui prévalent dans ce domaine.
Bonjour,
Comme vous le savez sans doute déjà, les mangas, en tant qu'œuvre de l'esprit sont protégés par le Code de la propriété intellectuelle. Ce sont les articles L.112-1 et suivants qui encadrent ces dispositions et notamment l'article L112-2 qui précise la notion d'œuvre de l'esprit :
Sont considérés notamment comme œuvres de l'esprit au sens du présent code :
1° Les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques ;
2° Les conférences, allocutions, sermons, plaidoiries et autres œuvres de même nature ;
3° Les œuvres dramatiques ou dramatico-musicales ;
4° Les œuvres chorégraphiques, les numéros et tours de cirque, les pantomimes, dont la mise en œuvre est fixée par écrit ou autrement ;
5° Les compositions musicales avec ou sans paroles ;
6° Les œuvres cinématographiques et autres œuvres consistant dans des séquences animées d'images, sonorisées ou non, dénommées ensemble oeuvres audiovisuelles ;
7° Les œuvres de dessin, de peinture, d'architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie ;
8° Les œuvres graphiques et typographiques ;
9° Les œuvres photographiques et celles réalisées à l'aide de techniques analogues à la photographie ;
10° Les œuvres des arts appliqués ;
11° Les illustrations, les cartes géographiques ;
12° Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l'architecture et aux sciences ;
13° Les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire ;
14° Les créations des industries saisonnières de l'habillement et de la parure. Sont réputées industries saisonnières de l'habillement et de la parure les industries qui, en raison des exigences de la mode, renouvellent fréquemment la forme de leurs produits, et notamment la couture, la fourrure, la lingerie, la broderie, la mode, la chaussure, la ganterie, la maroquinerie, la fabrique de tissus de haute nouveauté ou spéciaux à la haute couture, les productions des paruriers et des bottiers et les fabriques de tissus d'ameublement.
Cependant il n'est pas impossible de citer, reproduire ou utiliser tout ou partie de ces contenus sous certaines conditions. Le document publié par l'Apie, Droit d'auteur, droit à l'image : les étapes essentielles pour utiliser un contenu qui est proposé en téléchargement par l'Enssib développe et accompagne fort bien toutes les questions qui peuvent se poser à ce propos. L'utilisation d'un personnage de manga pour un visuel ne fait pas exception à la règle. D'abord il faut définir les utilisations projetées du contenu en cernant les types d’utilisation et supports (reproductions, représentation et communication à un public...), les conditions d’exploitation, la durée de l’utilisation envisagée et le territoire géographique sur lequel l’utilisation est projetée. Ensuite, lorsque ces emplois sont cernés, l’utilisateur "doit s’assurer que ces utilisations sont autorisées et/ou obtenir les autorisations éventuellement nécessaires" :
Trois situations peuvent se présenter :
- des conditions générales, des licences d’utilisations sont associées au contenu
(étape 2.1) ;
- le contenu est placé sous une licence libre (par exemple Creative Commons)
(étape 2.2) ;
- dans tous les autres cas, une autorisation spéciale à obtenir auprès du titulaire des droits
(étape 2.3).
Utiliser des personnages de manga entre vraisemblablement dans le troisième cas. Vous devez donc demander l'autorisation aux titulaires des droits pour obtenir les autorisations spécifiques en précisant bien sûr l'utilisation que vous voulez en faire :
Le titulaire des droits est le ou les auteur(s)
- personnes physiques qui a (ou ont) créé l’œuvre.
Toutefois, il peut s’agir d’une tierce personne à laquelle les droits ont été transmis :
- un partenaire économique de l’auteur qui a obtenu les droits par contrat ou par la loi : éditeur, producteur, agence, employeur, etc. ;
- un organisme de gestion collective auquel l’auteur a adhéré : les auteurs peuvent se rassembler pour gérer leurs droits d’exploitation au sein de structures qui deviendront les interlocuteurs des utilisateurs (la Sacem, par exemple) ;
- les héritiers de l’auteur : par exemple, pour les œuvres de Pablo Picasso, c’est la Succession Picasso, indivision constituée de ses héritiers, qui est titulaire des droits, et une structure mandataire « Picasso Administration » qui effectue la gestion et accorde les autorisations.
En outre, des personnes physiques ou morales peuvent se voir reconnaître des droits (appelés « droits voisins ») : c’est notamment le cas des artistes interprètes, producteurs de phonogrammes, producteurs de vidéo grammes, et entreprises de communication audiovisuelle.
Cela signifie que, bien que n’étant pas auteurs, ils disposent de certaines prérogatives dont il faut tenir compte dans l'exploitation de l'œuvre.
Déterminer qui détient les droits n’est pas toujours chose aisée : voici quelques conseils pour guider l’utilisateur :
- contacter l’entité à l’origine de la publication du contenu (éditeur de l’ouvrage, producteur/ diffuseur du film/ série, etc.) ;
- rechercher si les droits sont détenus par un organisme de gestion collective : ces organismes sont spécialisés dans un ou plusieurs genres ou secteur. Les sites web proposent parfois des moteurs de recherche permettant de déterminer si l’auteur concerné est membre de l’organisme et proposent des autorisations en fonction des types d’utilisations projetées. Les catégories ci-après des principaux organismes intéressant les utilisateurs sont à titre indicatif car les répertoires peuvent se croiser.
Dans tous les cas, pour utiliser une œuvre vous devrez respecter le droit moral de son auteur :
► Mentionner le nom de l’auteur en relation avec l’œuvre.
Par exemple :
- mentionner le nom de l’auteur sur les exemplaires de l’œuvre (ouvrage, fascicule etc.) ;- indiquer le crédit à côté d’un contenu (photo, vidéo, infographie, etc.), idéalement d’une telle manière qu’il en soit indissociable (en particulier dans le domaine numérique, par exemple en cas de copie, de « retweet », etc.) et, le cas échéant, la source (agence, banque d’images, etc.). La présence d’un « ours » ou d’une rubrique « crédits » au sein d’une publication mentionnant les auteurs d’œuvres qui y sont intégrées est acceptable seulement s’il est possible d’attribuer à chacun l’œuvre dont il est l’auteur sans ambiguïté ;
[...]
► Respecter l’œuvre en l'utilisant dans des conditions les plus proches possibles de celles qu’a voulues l’auteur :
- respect de son intégrité : attention aux actes modifiant la forme de l’œuvre telle que réalisée par l’auteur (coupes, réécritures, colorisation, inversion du sens, etc.). L’utilisateur, même lorsqu’il a l’autorisation de modifier ou adapter une œuvre, doit tenir compte du fait que l’auteur conserve le droit d’agir contre une modification qu’il estimerait irrespectueuse de l’œuvre ;
- respect de son esprit : cela vise des modalités d’utilisation méconnaissant la volonté, l’esprit, que l’auteur a donnés à l’œuvre (détournements politiques ou promotionnels, utilisation pour illustrer des propos contraires aux positions de l’auteur, etc.).► Ne pas publier une œuvre qui n’était pas destinée à publication sans le consentement de l’auteur (par exemple, une photo dans un album à accès privé sur un réseau social)
[...]
En matière de manga les droits semblent particulièrement protégés à en juger cet avertissement des éditions Pika, Puis-je utiliser un visuel de manga ou livre édité par Pika Édition ? et cet échange entre internautes, Droits d'auteur pour utiliser des images de Naruto ou One piece ?.
A lire également, L'éditeur de Dragon Ball, Shūeisha, attaque les partages d'images sur Twitter, ActuaLitté, janvier 2021 et, un peu plus éloigné du sujet mais non dénué d'intérêt, Le droit du Cosplay, Livres Hebdo, mars 2021.
Nous vous rappelons cependant qu'en tant que bibliothécaires, nous ne sommes pas expert·es en la matière et vous recommandons de prendre conseil auprès d'un juriste.
Bonne journée.